24 novembre 2020 Les Petites Glo c’est la newsletter où on apprend à changer le monde avec Chloé Thibaud. Changer le monde, oui. Même quand on n’a ni pouvoir ni argent. Si on vous a transféré cet email, vous pouvez vous inscrire – gratuitement – ici. C’est une angoisse avec laquelle on apprend à grandir, parce qu’on ne nous laisse pas le choix. Très tôt, on nous explique qu’il ne faut pas parler aux inconnus dans la rue. Qu’il ne faut pas faire attention si l’on s’adresse à nous alors qu’on n’a rien demandé. Qu’il faut tracer notre route si quelqu’un s’approche de trop près. En tant que fille, on nous apprend à fuir. Fuir le danger. Parce qu’il y a un danger à se tenir seule dans l’espace public : qu’on porte un jogging ou une jupe, que cette jupe nous arrive sous les chevilles ou au-dessus des genoux, qu’on soit maquillée ou non, qu’on se sente confiante ou mal dans notre peau comme en plein SPM. C’est pourquoi, du 13 octobre au 3 novembre, nous avons mené une enquête sur le site des Glorieuses en vous proposant de répondre à un questionnaire sur le harcèlement. Notre objectif était de connaître le vécu des jeunes femmes cis et trans âgées de 14 à 24 ans dans l’espace public, et nous souhaitions publier les résultats avant la journée de demain, 25 novembre, consacrée à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Vous avez été plus de 1200 à participer, et pour cela je tiens à vous remercier. Car même si ça fait mal à mon petit cœur de littéraire, je dois l’admettre : il n’y a rien de plus parlant que les chiffres pour mesurer l’étendue d’un problème. Et là, les Petites Glo, on a un sérieux problème. En effet, 99% des filles de 14 à 24 ans interrogées ont déclaré avoir déjà vécu une situation de harcèlement de rue où une personne les a regardées de façon insistante, déplacée. 99%… Ça ne m’a même pas étonnée. C’est logique, puisque je prononce toujours cette phrase quand on me lance sur le sujet : “Je ne connais pas une fille qui ne s’est jamais faite emmerder dans la rue ou les transports.” Et vous ? Camille, 15 ans, m’a confié ceci : “Ce que je déteste, c’est quand je dois attendre mon bus pendant plus de 10 minutes pour rentrer des cours. Je peux être sûre qu’à chaque fois il va y avoir un mec plus âgé qui va me mettre mal à l’aise. On peut se dire qu’un regard, c’est rien, que ça risque rien. Mais quand je sens qu’on me fixe, qu’on mate ma poitrine, je me mets à respirer plus fort, à avoir chaud. J’ai juste envie de me cacher et qu’on me laisse tranquille.” Vous vous doutez bien que ça ne s’arrête pas là. Au-delà des regards malsains, 96% des filles se sont déjà retrouvées face à une personne qui leur fait des bruits répétés pour attirer leur attention. Vous savez, ce petit “Pssst” dont certains s’amusent en le caricaturant dans des sketchs : “Pssst ! Mademoiselle ! T’es charmante, tu me donnes ton 06 ?” Il y a aussi le sifflement, oppressant, qui nous rappelle que celui qui l’utilise ne nous considère pas autrement que comme un animal. Comme une chienne qu’on siffle. Et puis il y a les insultes et/ou les mots à connotation sexuelle, entendus et subis par 86% des répondantes. Plus de 4 filles sur 5, donc. Parce que messieurs les humoristes, dans la vraie vie, la suite de “T’es charmante, tu me donnes ton 06 ?”, c’est souvent “Eh sale pute, tu pourrais répondre quand j’te parle !”. Dans la vraie vie, et particulièrement quand on est ado, répondre nous apparaît malheureusement comme un risque d’être agressée, plus seulement verbalement mais aussi physiquement. On nous explique que répondre, ce serait en rajouter, entrer dans le jeu, et qu’il vaut mieux se taire, “ne pas chercher”. Mais ne pas répondre présente aussi des risques. “Je me souviens d’une fois où j’ai eu vraiment, vraiment peur, m’a raconté Solène, 18 ans. Je rentrais chez moi, il faisait déjà nuit, et deux types que j’ai croisés m’ont parlé. Je n’ai pas très bien entendu parce que j’avais mes écouteurs, mais ils ont continué à me parler vu que je répondais pas et que j’avançais sans les regarder. L’un des deux s’est mis à me suivre. J’ai coupé ma musique et je me suis mise à marcher de plus en plus vite. J’avais le cœur qui battait de plus en plus fort. Je me faisais des films : et s’il me rattrape ? Et s’il me tape, me viole ?” Le récit de Solène est insupportable tant il est fréquent de l’entendre. Et notre sondage le confirme : plus de 3 filles sur 4 ont déjà été suivies dans la rue pendant une partie ou l’intégralité de leur trajet. Face à ces constats glaçants, nous vous avons demandé si vous aviez une “technique” pour essayer de mettre un terme aux différentes situations de harcèlement de rue. Parmi les principales réponses, j’ai retenu : Faire croire que j’ai un copain, qu’un ami m’attend, demander d’arrêter, adresser un grand sourire, le regarder de haut en bas et dire « Non, j’ai mieux à faire », appeler quelqu’un, demander de l’aide aux gens autour, faire un regard noir, parler fort, crier, faire un doigt, lui demander de répéter, insulter, prendre en vidéo, cracher, péter, roter, faire semblant de vomir, faire le chat qui crache, faire l’idiote qui ne comprend pas les intentions de l’autre, faire la grimace, faire la sourde, dire “Je suis mineure, tu veux aller en prison?”, avoir du spray au poivre, mettre mon doigt dans mon nez, trouver une manière de montrer mes aisselles non-épilées et si ça ne les décourage pas, parler avec n’importe qui pour faire comme si j’étais avec une connaissance jusqu’à ce qu’ils lâchent l’affaire, utiliser un sifflet, changer mes pratiques, m’habiller comme un homme, mettre des écouteurs, me déplacer à vélo, ignorer, baisser la tête, fuir, changer de chemin, courir, entrer dans un magasin… Quel enfer. Pour ma part, je garde le souvenir de cette fois où, revenant d’une année d’études à l’étranger, j’avais répondu “Oh, sorry, I don’t speak French” à un harceleur du métro. En sortant de la rame, j’avais pensé : “La classe ton accent, il a dû croire que t’étais vraiment anglaise !”. Oui, j’avais pensé ça au lieu de me dire “What the fuck Chloé, pourquoi tu fais semblant de ne pas parler français pour esquiver un abruti ?”. La réponse : parce que je n’avais aucune idée de comment je pouvais – réellement – me défendre. Aujourd’hui, grâce au travail de nombreuses associations, notamment sur les réseaux sociaux, mais aussi par l’intermédiaire de programmes tels que Stand Up, vous pouvez vous former gratuitement pour intervenir si vous êtes victime ou témoin de harcèlement dans l’espace public. Il est plus que temps d’agir. Dans 89% des cas, les filles harcelées l’ont été pour la première fois alors qu’elles étaient mineures. Et dans 95% des cas, elles ont été harcelées par un ou plusieurs hommes. Combien de fois faudra-t-il dire non à cette hypersexualisation des filles dès le plus jeune âge ? Combien de fois faudra-t-il répéter aux garçons que nos corps ne leur appartiennent pas ? Combien de fois ? Jusqu’à ce que 100% des femmes puissent se déplacer sans être harcelées. Un mot de notre partenaire, L’Oréal Paris sur le programme Stand up contre le harcèlement de rue En France, 81 % des femmes ont déjà été victimes de harcèlement sexuel dans les lieux publics et seulement 20 % d’entre elles déclarent avoir été aidées par un témoin*. Mais comment réagir ? Stand Up est un programme international de formation créé par L’Oréal Paris en partenariat avec l’ONG Hollaback! et la Fondation des femmes, qui permet d’apprendre à intervenir lorsqu’on est témoin ou victime de harcèlement sexuel dans les lieux publics, sans se mettre en danger. Basé sur la méthodologie des « 5D » (Distraire, Déléguer, Dialoguer, Diriger et Documenter), il apporte à chacun.e les outils et réflexes qui l’aideront au quotidien à identifier les situations de harcèlement et savoir comment réagir pour y mettre fin, grâce à 5 actions simples, mais qui peuvent être déterminantes. La formation Stand Up est accessible à tous.tes, rapide et gratuite, sur le site officiel du programme. * Sondage mené par L’Oréal Paris et Ipsos en mars 2019, « Sondage mondial sur le harcèlement sexuel dans les lieux publics ». – Par L’Oréal Paris, en partenariat avec Hollaback! et la Fondation des Femmes ![]() Les recommandations de ChloéParticiper à des enquêtes, c’est important. Trois associations, dont la Fédération des Associations Générales Etudiantes (FAGE), en ont lancé une sur la précarité menstruelle étudiante. Elle a pour but de “revendiquer auprès des décideur.euse.s politiques la mise à disposition gratuite de protections périodiques dans tous les lieux d’enseignements”. Si vous êtes concernée, ça se passe ici. « C’est dur de comprendre pourquoi le monde entier ne se bat pas comme si sa vie en dépendait. » Jeudi dernier, plusieurs centaines de jeunes ont lancé une “fausse COP” virtuelle pour “rappeler l’urgence de lutter contre le réchauffement climatique, alors que les négociations internationales ont été repoussées pour cause de Covid-19”. À 14 ans, Chadia Loueslati avait des seins beaucoup plus gros que ceux des autres filles. Dans sa dernière BD, Rien à perdre, elle raconte comment le regard que la société a posé sur elle dès l’adolescence l’a amenée à se faire réduire la poitrine une fois devenue adulte. L’amour, la puberté, le rapport au corps… On en parle est une série documentaire qui donne la parole à huit ados entre 14 et 16 ans. On la doit à la réalisatrice Léa Bordier, et les épisodes (tous aussi intéressants les uns que les autres) sont disponibles gratuitement sur YouTube. À binge-watcher sans hésiter ! « Le constat est clair : malgré une indépendance économique renforcée, beaucoup de femmes sont toujours enfermées dans des relations violentes. » Dans la newsletter #Economie, « L’argent, le pouvoir ? », Anne-Dominique Correa s’est intéressée aux liens entre le statut professionnel des femmes et les violences domestiques. Pendant un mois, En avant toute(s) et Safe Place réalisent une levée de fonds exclusivement sur Instagram. Objectif ? Sensibiliser toujours plus de personnes à la question des violences faites aux jeunes femmes et personnes LGBTQIA+. #Autopromo – Suite à ma dernière newsletter (« Les jeunes vont mal, personne n’en parle« ), j’ai fait un passage chez France 24 pour parler des conséquences psychologiques du confinement sur la santé mentale des jeunes. #4Novembre16h16La campagne pour l’égalité salariale est lancée et en 2020, c’est à partir du #4Novembre16h16 que les femmes travaillent gratuitement du fait des inégalités de salaire avec les hommes. Nous avons lancé une pétition pour un plan de relance féministe ! C’est à signer et faire signer ici : |
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