9 septembre 2020 Bienvenue aux nombreuses nouvelles inscrites à la newsletter Les Glorieuses. Chaque mercredi, vous recevez une analyse féministe de l’actualité et des liens vers des articles inspirants et des événements qu’on soutient. Si on vous a transféré cet email, vous pouvez vous inscrire – gratuitement – ici et nous contacter à [email protected]. Si vous saviez à quel point j’ai galéré à écrire la newsletter de la semaine dernière. Un niveau de galère qui mène au fait que je connais désormais par cœur la recette des « boules coco » et que je sais désormais pourquoi certaines filles marchent sur la pointe des pieds lorsqu’elles sont pieds nus. Alors que je n’aime pas la noix de coco. Eh oui, c’est parce qu’elles ont les pieds plats. J’ai passé huit heures à passer de sites en sites, de profils Twitter en profils Instagram, de recettes en recettes pour me retrouver devant une Page (la majuscule tient au nom du logiciel, pas du tout au caractère sacré de la chose) blanche. Nada. Rien du tout. Aucune idée de ce que j’allais raconter pour démarrer la nouvelle saison de la newsletter. J’étais complètement HS. On nous dit qu’il faut être forte alors on est forte. Qu’il faut produire alors on produit. Qu’il faut être « empouvoirée ». Tout le temps. Eh bien non. Ce n’est pas possible. Ce n’est pas possible d’être la femme empouvoirée qui vit chaque rentrée sans être submergée, qui s’évertue à débattre avec tous ceux qui ont un mode de pensée où l’égalité femmes-hommes est acquise depuis 1944. Ce n’est pas possible d’être en permanence « empouvoirée ». Et j’ajouterais même, la doctrine de l’« empouvoirement » se heurte à double leurre. Collage par moi-même. Merci du soutien. Le premier est qu’il apparaît comme une injonction à se sentir puissante (sans l’être vraiment). Et de facto, nous le savons, l’injonction est contradictoire avec le message féministe. On ne va pas remplacer l’injonction à se maquiller ou à porter un soutien-gorge (un soutien quoi ?) pour se retrouver à ramer pour être une superwoman. Ce sentiment est un leurre. « Qui pourrait affirmer que nos sociétés sont désormais égalitaires ? raconte l’avocate Gisèle Halimi (Entretiens avec Annick Cojean, Une farouche liberté, Grasset, 2020). Que la question est réglée, que les femmes jouissent d’un statut équivalant à celui des hommes, qu’elles ne sont pas sous-sujets, sous-citoyennes, sous-représentées dans les instances décisionnelles ? Avez-vous vu les photos de la table des négociations sur les retraites à Matignon ? » « Vous pouvez être tout ce que vous voulez. » Non, c’est faux. L’égalité n’est pas là et nous le faire croire est dangereux. Dans un deuxième temps, le message d’« empouvoirement » implique une volonté de mettre au niveau des hommes. « Sois forte » « Fearless female » « Osez tout », « N’ayez pas peur », et j’en passe. Mais, le niveau des hommes est bien bas. Le monde qu’ils ont construit est si peu reluisant que les jeunes (oui j’ai atteint Ce n’est pas aux femmes de s’adapter à ce monde, c’est aux hommes de changer. D’anéantir la culture du viol, de remplacer un système capitaliste qui laisse les femmes avec une inégalité de richesses économiques depuis son avènement, d’intégrer pleinement l’écologie à la pensée politique. Ce n’est pas aux femmes de s’adapter à ce monde, c’est au système d’être remplacé. « Il faut […] casser ce système, rappelle Halimi. Dessiller les yeux. Obliger chacun à regarder le monde tel qu’il est, non tel qu’il est raconté dans un narratif fallacieux, destiné à faire croire à une harmonie complémentaire entre les sexes. Ça suffit, la fiction ! » Ne me méprenez pas. Oui, la pensée autour de l’« empouvoirement » des femmes part d’un bon sentiment. J’y ai moi-même, à mon échelle, contribué. Les femmes et les filles sont en droit de tout vouloir, d’aspirer à la totalité. Mais n’est-ce pas une énième promesse que nous sommes sûrs de ne pas pouvoir honorer ? N’est-ce pas surtout donner le sentiment aux femmes l’illusion de quelque chose qui n’arrivera jamais ? Car le système dans lequel nous vivrons empêchera à cette promesse de se réaliser : la promotion ira à celui qui n’a pas à se soucier de la charge mentale, les filles choisiront moins les voies qui mènent à des postes très rémunérés. Aux messages d’« empouvoirement » peuvent se substituer les messages qui encouragent à l’égoïsme, comportement quasi interdit aux femmes. À ce sujet, l’avocate Gisèle Halimi dit : « Soyez égoïstes ! » « […] L’Histoire leur a dicté cette attitude de réserve, voire de retrait : une femme ne doit pas faire de bruit, ne pas déranger, ne pas se faire remarquer, ne pas avoir l’esprit de compétition, ne pas chercher la gloire. Ça, c’est réservé aux hommes. Mais rebellez-vous ! Pensez enfin à vous. À ce qui vous plaît. À ce qui vous permettra de vous épanouir, d’être totalement vous-mêmes et d’exister pleinement. Envoyez balader les conventions, les traditions et le qu’en dira-t-on. Fichez-vous des railleries et autres jalousies. Vous êtes importantes. Devenez prioritaire. » Nulle envie de décourager celles et ceux qui veulent susciter des vocations et des envies à coups de phrases chocs. Mais mon propos est de nuancer ces messages qui sont si rapidement repris pour un usage marketing. Les messages ne sont pas suffisants, ils sont même contre-productifs. Ils font croire que l’égalité est là, que les opportunités sont les mêmes pour toutes et tous. Ces messages nous font oublier que c’est la révolution qu’il faut faire. « Une révolution des mœurs, des esprits, des mentalités dit Halimi. Un changement radical dans les rapports humains, fondés depuis des millénaires par le patriarcat : domination des hommes, soumission des femmes. […] Ce système n’est plus acceptable. Il est même devenu grotesque. » Changeons le système, laissons les femmes tranquilles. La revue de presse Pour lutter contre la pandémie, le Panama a mis en place une mesure originale : les femmes ont le droit de sortir les lundis, mercredi et vendredis tandis que les hommes peuvent sortir les mardis, jeudis et samedis. Sauf que cette mesure est excessivement dangereuse pour les personnes transgenres. C’est l’occasion de rappeler que le continent américain est le plus dangereux pour les personnes transgenres car il concentre 86% des meurtres mondiaux (en anglais). Eliane Radigue est une génie de la musique électronique française. Sa « force créative » et son « obstination » sont ce qui lui a permis de survivre dans un monde où les femmes sont systématiquement ignorées. Beyoncé vient d’ajouter $1 million à la fondation BeyGOOD pour soutenir les petites entreprises appartenant à des personnes noires. Le deuxième round de subventions Les femmes universitaires blanches sont toujours privilégiées par rapport aux femmes et hommes universitaires racisés·e·s au Royaume-Uni (en anglais). Valerie Solanas est une figure très complexe, c’est un symbole de la rage féminine dit Breanne Fahs dans l’émission « Une histoire particulière ». Connue pour avoir tenté d’assassiner Andy Warhol, elle est surtout une féministe Lauren Bastide, la voix de La Poudre a sorti son premier essai féministe, « Présentes« . La journaliste signe un livre qui a le don d’être à la fois engagé, didactique, hyper agréable à lire. « BY US MEDIA » lance AFRONOMIE une nouvelle série de vidéos documentaires en allant à la rencontre de chef·fe·s Dans l’émission « Modern Love » de Nadia Daam, Chloé Delaume donne terriblement envie d’acheter son dernier livre, « Le cœur synthétique » (Seuil). C’est un livre de « looseuses » qui se débattent toutes avec le célibat et qui repose sur un constant : 13700 femmes célibataires ne pourront pas trouver de conjoint car nous sommes plus nombreuses. Et ça a l’air trop drôle. Information partenaire, vous avez jusque ce jeudi soir pour participer au concours JC Lattes x Les Glorieuses sur Instagram, et tenter de gagner pour vous et deux de vos amies, le dernier ouvrage de Lisa Taddeo, « Trois femmes ». Pour en savoir plus, rdv sous ce commentaire. Un message de notre partenaire BULB Pour Bulb, l’énergie verte doit être accessible à tou.te.s. Alors notre électricité renouvelable est moins chère, plus simple, et 100% française. Bienvenue au XXIe siècle. |
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