Les Glorieuses
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‘Je m'engage pour la joie’ : une conversation avec l'autrice recommandée par Barack Obama, Lauren Groff. Cʼest votre première fois ici et vous nʼêtes pas abonné·e ? Vous pouvez vous abonner ici pour la recevoir tous les mercredis (ou presque). Lire la newsletter en ligne ici – https://lesglorieuses.fr/lauren-groff/ Cette semaine, je vous propose un entretien avec l’écrivaine américaine Lauren Groff. Née en 1978, elle est notamment l’autrice du roman, Les Furies (L’Olivier, 2017),qui a connu un extraordinaire accueil critique et public. Elle a également publié Les Monstres de Templeton (Plon, 2010), Arcadia (Plon, 2011) et plus récemment Matrix (L’Olivier, 2023). Cette conversation a eu lieu dans le hall d’un hôtel à Vincennes dans le cadre du Festival America vendredi dernier – j’en profite pour remercier toute l’équipe du festival, et en particulier Louis, pour leur gentillesse et leur aide précieuse. Cette conversation s’est déroulée en anglais (le transcript original est en bas de cette newsletter), elle a été très légèrement éditée puis je l’ai traduite. Durant cette conversation, on a parlé de BEAUCOUP de livres – le dernier livre de Lauren Groff traduit en français, Matrix (Éditions de L’Olivier), mais également Les Furies. On a parlé de Guerre et Paix de Tolstoï, de Middlemarch de Georges Eliot, Mr. Bridge and Mrs. Bridge, de Evan S. Connell, Vers le phare de Virginia Woolf, ou encore de La Mer, la mer d’Iris Murdoch.. Mais aussi d'Anaïs Nin, de Christine de Pizan (La Cité des dames). Si la conversation vous plaît, vous pouvez m’envoyer la phrase préférée de cette conversation pour tenter de gagner un des deux exemplaires de Matrix. « Je voulais créer une boîte de Pétri pour voir ce qui se passe quand les femmes sont au pouvoir. » Rebecca Amsellem Votre dernier livre traduit en français, Matrix, porte sur Marie de France, la première poétesse à écrire en français. Lors d'une conversation avec Margaret Atwood, vous avez mentionné que même si le roman se déroule au xiie siècle, il parle bien d'aujourd'hui. En quoi est-ce le cas ? Lauren Groff J'ai réalisé que la fiction historique pouvait être un outil pour parler de l'urgence de notre époque. On m'a appris que la fiction historique était un peu suspecte – cela vient d'Henry James, qui détestait le genre. Je soupçonnais donc la fiction historique de faire du tourisme dans le temps. Elle ne faisait pas ce que la fiction doit faire, c'est-à-dire être un miroir des problèmes du présent. Puis j'ai réalisé que mes œuvres de fiction préférées étaient toutes des fictions historiques. Guerre et Paix est une fiction historique. Middlemarch est une fiction historique. La grande majorité des livres avec qui j'ai grandi en écrivant sont des fictions historiques. Tout est historique d'une manière ou d'une autre. Même la science-fiction parle de l'époque à laquelle elle est écrite. J'ai ensuite été très enthousiaste à propos de Marie de France car nous ne savons rien d'elle. Nous savons qu'elle s'appelle Marie, qu'elle vient de France et qu'elle a écrit en Angleterre. Mais tout le reste n'est qu'une projection sur laquelle les historien·ne·s peuvent faire des suppositions, sans vraiment savoir quoi que ce soit. J'ai vu cette figure extraordinaire sortir de l'univers des fables. Elle était vaste comme Hildegard von Bingen était vaste et capable de contenir des multitudes. Elle était capable de prendre de gigantesques abstractions et de les transformer en quelque chose de bien réel pour les femmes, ce qui est incroyable surtout à l'époque médiévale, où les structures étaient si strictes sur la vie des femmes. Soit on faisait partie de la royauté, soit des roturiers, puis on se mariait et on mourait en couches ou on se prostituait. C’était les trois voies. À celles-ci s'ajoute une quatrième, s'ajoute la voie religieuse. J'étais très enthousiaste à l'idée de parler d'un monde alternatif où il n'y avait pas d'hommes. Mes traducteurs et traductrices du monde entier m'ont détestée pour cela, car il n'y avait pas d'hommes visibles. Il y a des ombres d'hommes dans ce livre. Même les animaux étaient des femelles ou quelque chose entre les deux, aucun animal mâle dans le livre, ce qui est vraiment difficile à traduire en français. C'est devenu ce microcosme du monde que je vivais sous la présidence de Trump, où je voulais créer une boîte de Pétri pour voir ce qui se passe lorsque les femmes sont au pouvoir si nous avons intériorisé les mêmes règles et structures qui nous enferment. Même si c'est une personne extraordinaire, Marie de France a aussi reproduit les préjudices qui lui ont été causés par le patriarcat. Rebecca Amsellem Ce que vous avez dit m'a fait penser à deux choses. La première est cette citation d'Anaïs Nin : « Si je n'avais pas créé mon propre monde, je serais probablement morte dans celui des autres » et je crois que c'est ce que Marie de France a dû ressentir. L'autre pensée est celle d'une autre femme qui a vécu à la même époque, Christine de Pizan. Je pense qu'elle est devenue veuve à 23 ans – cela signifiait qu'elle avait la liberté de faire ce qu'elle voulait. Lauren Groff Elle a écrit La Cité des femmes, c'est spectaculaire. « Peut-être qu'être une connasse est une bonne chose. » Rebecca Amsellem Dans le même roman, vous écrivez cette phrase merveilleuse qui, j'en suis sûre, fait écho à BEAUCOUP de femmes : « Les femmes agissent contre toutes les lois de l'obéissance quand elles se rendent inaccessibles. » C'est épuisant de se rendre disponible pour tout le monde à tout moment, et ce n'est pas perçu comme particulièrement « féminin » de ne pas l’être. Comment se rendre moins disponible, mais comment le faire en sachant que cela aura des conséquences et qu'on nous traitera de tous les noms. Sans être considérée comme une connasse [la traduction de bitch en français a été compliquée, c’est moins fort que « connasse » – NDRL], si je puis me permettre ? Lauren Groff Je suppose qu'il ne faut pas se soucier d'être considérée comme une connasse. Lorsque vous êtes une femme et que vous vous présentez comme telle dans le monde, votre corps devient un bien commun. Si vous avez déjà été enceinte dans le monde, vous savez que des étrangers viennent vous toucher, parce que le bébé est considéré comme celui de tout le monde. Le fait est que nous ne saurons jamais qui nous sommes si nous sommes continuellement vues comme disponibles. Il existe de nombreuses méthodes pour y parvenir. Nous désactivons la disponibilité via la féminité. La féminité est en partie une performance. Certaines personnes refusent la féminité en tant que performance. D'autres sont des connasses. Peut-être qu'être une connasse est une bonne chose. On ne voit jamais un homme s'inquiéter d'être une connasse. Rebecca Amsellem J'adore. Je ne sais pas comment je vais traduire cela. Un de vos précédents romans, Les Furies (Éditions de l’Olivier), est un livre sur le mariage. Il fait partie de ma « liste » – c’est-à-dire qu’à chaque fois qu'on me demande une liste de livres qu'il faut lire dans sa vie si l'on veut éprouver de la joie en lisant, je le cite. Ce livre a été un véritable best-seller, et je suis sûre que vous avez reçu des millions de messages sur l'impact de sa lecture. Vous souvenez-vous d'un message qui vous a particulièrement touché ? Lauren Groff Pour Matrix, quelqu'un m'a dit que sa mère avait réalisé qu'elle était lesbienne après avoir lu le livre. Mais pour Les Furies, je ne me souviens de rien en particulier, si ce n'est que le président Obama l'a aimé, l’a dit et ça a changé ma vie. C'était quelque chose d'assez extraordinaire. Rebecca Amsellem C'est d’ailleurs comme cela que j'ai découvert le livre. Lauren Groff Vous voyez ? Je lui en suis tellement reconnaissante. C'est tellement bizarre pour moi d'être si reconnaissante à un homme d'avoir attiré l'attention des gens sur mon travail. © Eli Sinkus « Je pense que l'on peut aimer quelqu'un pour son âme sans tout connaître de lui. » Rebecca Amsellem J'aime la façon dont vous avez utilisé le mariage comme une institution pleine de mensonges et de vérités à la fois, l'ambivalence de tout partager avec une personne, tout en ne la connaissant peut-être pas du tout. Il y a cette citation que j’aime particulièrement : « Le mariage est un tissu de mensonges. Gentils, pour la plupart. D’omissions. Si tu devais exprimer ce que tu penses au quotidien de ton conjoint, tu réduirais tout en miettes. Elle n’a jamais menti. Elle s’est contentée de ne pas en parler. » La dualité entre vérité et mensonge // réalité et fiction est une sorte d'obsession pour moi – en particulier avec ce qui se passe dans la sphère politique, je me demandais si vous aviez commencé avec l'idée d'écrire sur le mariage ou sur cette dualité qui est omniprésente dans notre société. Je suppose que ma question est la suivante, parce qu'elle est au cœur de l'histoire, voulez-vous d'abord parler de la réalité entre les mensonges et la vérité, ou entre la fiction et la réalité puis le mariage est venu, ou l’inverse ? Lauren Groff Je me suis inspirée de deux livres écrits au milieu du xxe siècle, Mr. Bridge et Mrs. Bridge d'Evan S. Connell. Il s'agit d'une œuvre incroyable, car vous avez une vision stéréophonique de ce mariage. Mrs. Bridge est un bien meilleur livre que Mr. Bridge, il est fondé sur les propres parents d'Evan S. Connell, extraordinaires. Ce que je voulais faire au départ, c'était raconter deux histoires distinctes qui seraient radicalement différentes si elles étaient lues de différentes manières. Je suis obsédée par la communauté et l'utopie. Ce sont des choses auxquelles je reviens sans cesse. Un mariage est une utopie. C'est un petit projet utopique entre deux personnes, et vous vous réveillez chaque jour dans ce projet imparfait. Il est toujours imparfait, et vous vous y engagez comme on s'engage dans un projet utopique. Parfois, cela ne fonctionne pas, comme la plupart des utopies. Je me suis intéressée à la plus petite communauté possible que l'on puisse créer, le mariage. Je voulais savoir s'il pouvait y avoir une relation amoureuse qui ne dise pas tout, qui comporte beaucoup d'espace blanc, de secret et d'intimité. Je pense que l'on peut aimer quelqu'un pour son âme sans tout savoir sur lui. Et je voulais résister aux récits de mariage que j'ai lus auparavant, qui reposent entièrement sur l'adultère. Il y a des tentations dans le livre, mais personne n'est jamais vraiment infidèle. C'est avec tout cela que je voulais jouer. En fait, je ne faisais que m'amuser. Lorsque j'ai écrit ce livre, j'étais en train d'écrire mon précédent livre, Arcadia, et j’ai accroché au mur deux énormes feuilles de papier et j'ai écrit une scène du point de vue de la femme, puis j'ai traversé la pièce et j'ai écrit la même scène du point de vue de l'homme. « Je m'engage pour la joie. » Rebecca Amsellem Vous venez de mentionner que la joie fait partie de votre processus créatif. Dans une interview accordée au New York Times, vous avez déclaré : « J'écris pour – qui sait ? L'exploration et la joie, autour de questions, d'une thèse centrale ou d'une image. » Avec cette phrase, vous mentionnez sans hésiter la joie comme un élément nécessaire du processus d'écriture. J'adore cela, d'autant plus que nous vivons avec le fantasme des écrivains qui vivent des expériences de mort imminente lorsqu'ils commencent ou terminent un roman. Lauren Groff Je m'engage pour la joie. Si un livre naît de la souffrance, le lecteur ressent la souffrance. Il y a beaucoup de fausses idées sur ce qu'est l'art. Beaucoup de lecteurs affirment qu'ils n'aiment pas écrire, mais qu'ils aiment avoir écrit. Cela me rend profondément triste, car cela signifie qu'ils n'apprécient pas le véritable acte artistique, qui consiste à lutter, à échouer, à réessayer, à trouver l'énergie, à découvrir la voie à suivre. C'est tout cela le véritable art, le produit n'est pas le véritable art. Il devient de plus en plus urgent de comprendre que c'est l'acte de création qui est l'art et non le projet fini parce que l'IA. Il y a tellement de gens qui mettent sur le marché des livres qui viennent d'être créés par des ordinateurs en disant qu'ils sont des écrivains, mais ce ne sont pas des écrivains. C'est l'acte d'échouer, d'échouer, d'échouer, et finalement d'arriver à quelque chose de vrai, qui fait du bien et qui résonne. C'est ce qui fait la beauté du métier d'écrivain. Souvent, lorsque je n'apprécie pas le processus, je sais que c'est le travail qui me dit que je n'y suis pas encore arrivée, et je dois me mettre dans une position où je suis ouverte. Parfois, cela demande beaucoup de travail personnel. Il ne s'agit pas seulement de travailler sur le livre lui-même. Parfois, cela signifie simplement que je dois m'amuser. Rebecca Amsellem Vous venez d'évoquer l'échec comme joyeux. Dans la même interview, vous parlez des projets qui ont été abandonnés – une source de grande frustration pour beaucoup d'entre nous. Mais vous dites que le fait d'abandonner des projets – je me souviens que vous avez parlé d’avoir mis le feu à l'un de vos manuscrits – n'est pas ressenti comme un échec, parce que tout ce temps et tous ces efforts ne sont pas perdus. Lauren Groff Tout est une question d'entraînement. Je ne mets aucune pression sur un manuscrit pour qu'il soit terminé, car il faut parfois des décennies pour que l'histoire trouve la façon dont elle doit être racontée. Je travaille sur quatre choses à la fois. Je vais là où il y a de l'énergie, là où il y a de la chaleur. D'autres personnes s'épanouissent vraiment dans des conditions misérables, alors laissez-les faire. Mais pour moi, je ne peux pas être une personne heureuse et une écrivaine si je ne trouve pas de joie dans mon travail. Rebecca Amsellem Dans un article que vous avez écrit pour The Atlantic, vous avez mentionné un passage de Vers le phare de Virginia Woolf : « [M. Ramsay, trébuchant dans un passage un matin sombre, tendit les bras, mais Mme Ramsay étant morte assez soudainement la nuit précédente, ses bras, bien que tendus, restèrent vides] comme l'un de vos préférés. Le livre que vous décrivez est l'un de vos préférés car il « capture la nature fugace du bonheur et le transfère directement au lecteur. C'est une sorte de possession littéraire, un fantôme ». Lauren Groff Si nous le lisons rapidement, nous ne voyons pas tout à fait ce qui se passe. Dans ce passage précis, tout se passe entre parenthèses, à l'intérieur des parenthèses, qui sont en fait les bras de M. Ramsey tendus vers sa femme perdue. Cette reproduction de la forme et de la fonction est si profondément agréable pour le lecteur, esthétiquement, qui peut ne pas comprendre exactement pourquoi c'est si émouvant sur le moment. C'est de l'art au plus haut niveau. C'est de l'artisanat au plus haut niveau, qui ne peut naître que du plaisir, de cette compréhension esthétique de ce que fait l'auteur. Rebecca Amsellem Vous avez mentionné dans une interview lire Middlemarch « une ou deux fois par an à cause de l’intelligence extraordinaire et calme de George Eliot » (je viens de commencer à le lire pour la première fois). Cela vous aide-t-il à mieux comprendre le fonctionnement de notre société actuelle ? Est-ce pour cela qu'il vous apaise ? Pourquoi une ou deux fois par an, c'est énorme (même en lisant 300 livres par an) ? Lauren Groff J'ai perdu très tôt la compréhension religieuse de Dieu. J'étais une enfant fervente, puis j'ai commencé à m'opposer au concept de Dieu en tant qu'homme anthropomorphique dans le ciel. Il me manquait une conscience plus vaste qui m'engloutisse. George Elliot est si spectaculaire parce qu'elle éclaire les choses de sa grande sagesse. On a l'impression qu'il y a quelque chose de plus grand que soi. J'y reviens parce que j'ai envie de cette conscience plus vaste, de cet amour qu'elle porte à la fois au lecteur et au personnage, c'est vraiment rare à trouver dans les livres de nos jours. J'aspire à cette grande générosité. Cela arrive peut-être cinq fois par an, on trouve cette profondeur de compassion, mais ce n'est pas fréquent. C'est pourquoi je reviens à Middlemarch, parce que je sais que je vais être tenue en haleine. Rebecca Amsellem Ce que vous décrivez m'a fait penser à un autre livre que j'ai lu cet été, La Mer, la mer d'Iris Murdoch. Lauren Groff J'aime tellement Iris Murdoch. C'est son meilleur livre, je crois. Rebecca Amsellem En tant qu'écrivaine, vous essayez de construire un monde entièrement nouveau, en l'imaginant. Un monde dans lequel les hommes et les femmes sont vraiment égaux. A quoi ressemble ce nouveau monde ? Y a-t-il des religions ? Quelles sont les valeurs fondamentales de cette nouvelle société ? Comment définir les institutions ? Lauren Groff C'est une question géniale, il faudrait que j'y réfléchisse pendant des jours avant de trouver quelque chose. Oh, attendez, je sais. Une toute petite chose serait qu'une infirmière ou infirmier se présente à la maison où il y a un nouveau-né tous les jours pendant la première année. Chaque jour, il ou elle frappe à la porte, entre, aide les parents, prépare un bon déjeuner et s'occupe du bébé. Il s'agit donc d'un service de garde d'enfants financé par l'État pour tout le monde. C'est ce qui me ferait dire que nous sommes vraiment dans l'utopie. Liste de choses que je recommande Si vous avez quelque chose à me recommander, une recette de cuisine, un endroit pour aller faire un jogging, un livre à lire, nʼimporte quoi : je suis preneuse, il suffit de répondre à cet email ! Allez voir Dance Me au théâtre du chatelet si vous pouvez - Tout, la chorégraphie, les visuels sur l'écran, les habits... et les danseurs : chacune et chacun ont transporté le public avec leur talent. Il reste quelques places (pas beaucoup) ici. La nouveau numéro de LIRE magazine sur les autrices qui ont fait New York. Oui on parle de Joan Didion, oui on parle d'Edith Warton, oui on parle de Sex & The City. Des nouvelles des porte paroles du #8Novembre16h48 - C'est la reprise du podcast de Insaff El Hassini, Ma Juste Valeur, avec Kaouthar Trojette. Et je vous conseille vivrement la newsletter d’Heloise Bolle, Prend l’Oseille ! Mon compte Instagram dédié à mes collages (allez oui, j'ose) - Papiers collés. Si vous vous êtes mise en collage, vous me les envoyez ? Collages par Papiers Collés ‘I wanted to create a petri dish of seeing what happens when women are in power’ ‘Maybe being a bitch is a good thing’ 'I think that you can love someone for their soul without knowing everything about them’. 'I do commit to joy’
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