« Le vide est tout puissant car il peut tout contenir, dans le vide, seul le mouvement devient possible. »
Charlotte Perriand
Hymne à l’âge adulte Pour lire la newsletter en ligne : https://lesglorieuses.fr/bye-bye-bonjour/ De temps à autre, je tente de sauter une mode pour m’éviter une perte de temps. Parfois, ça fonctionne : je n’ai jamais mis les pieds sur Houseparty et tout va bien. D’autres fois, je rate des choses : ainsi, je n’ai aucune idée de ce qu’il se passe sur TikTok. Et je découvre, des mois plus tard, que les tendances « meufs » ont massivement investi le réseau social en 2023. L’année du triomphe de Barbie a donc été l’année des « marches de meuf sexy » (#HotGirlWalks), comprendre marcher seule dans la rue pendant environ 6 kilomètres et penser à trois choses – ses accomplissements, ses buts et à quel point vous êtes sexy. 2023 a également été l’année des « dîners de meuf » (#GirlDinner), à savoir, manger exactement ce qu’on veut en A priori, je n’ai rien raté – ces tendances mettent sur un piédestal deux activités qui semblent être assez banales : marcher et penser à soi ; manger et faire ce qu’on veut. Ces tendances ont été suivies d’autres, écrit la journaliste Jessica Bennett dans les colonnes du NY Times : #CleanGirls pour celles qui ne mettaient pas de maquillage, #Snailgirls pour désigner celles qui préféraient prendre soin d’elles plutôt que de se tuer à la tâche (professionnelles). Toutes ces tendances, écrit la journaliste, ont un point commun : se prioriser sur les autres. Et, par là même, induisent que la version adulte est de prioriser les autres sur soi-même. La glorification de ces états adolescents peut se comprendre de deux façons. Dans un premier temps, elle advient à un moment où le passage à l’âge adulte s’accompagne d’une documentation sur les réseaux sociaux (et d’une comparaison permanente). « Je pense que beaucoup de ce que les filles célèbrent sont généralement des choses avec lesquelles nous avons du mal. » La journaliste Jessica Bennett cite Freya India, rédactrice de GIRLS – une newsletter qui explore ce qu’est être une jeune fille aujourd’hui. Dans un deuxième temps, ce triomphe est une revanche sur les univers qui laissaient les jeunes filles sur le côté. Glorifier les expériences de « meufs » (mot qui se rapproche le plus de ce qu’on nomme girl en anglais) c’est légitimer l’expérience adolescente de celles-ci. L’absence de leur représentation à l’écran (en dehors du remarquable Virgin Suicides de Sofia Coppola) laissait entendre que ces passages à l’âge adulte ne semblaient susciter aucun intérêt intellectuel. Les chambres en bordel, les papotages pendant des heures, les marches, les dîners, les rêves, les possibilités. Tout ce qu’il se passe dans l’imaginaire d’une personne avant que les conventions sociales viennent possiblement comprimer quelque aspiration. Collage réalisé par mes soins, 2024. En guise de porte d’entrée dans ses Mémoires, la chanteuse Britney Spears écrit : « Quand j’étais petite, allongée sur les rochers chauds du jardin de mes voisins, j’avais de grands rêves. Je me sentais calme et en contrôle. Je savais que j’allais être en mesure de réaliser mes rêves. » L’imaginaire de l’adolescence renvoie à cet état, à ce mode de pensée alors que celui de la femme adulte semble être synonyme de lutte permanente – pour le droit de procréer, pour le droit de ne pas procréer, pour la répartition équitable des tâches ménagères, « La blogueuse, écrit Jessica Bennett à propos de Freya India, parlait du moment où les filles sont assez grandes pour savoir qui elles sont, mais avant que la conscience de soi ne les frappe. » Le succès de ces tendances est une ode à ce moment précis de nos vies : rempli de rêves, de promesses, d’optimismes, quelques instants avant qu’il ne vienne se heurter à l’étape qui suit, celle d’être une femme adulte. « Tout pourra arriver quand être une femme ne voudra plus dire : exercer une fonction protégée », écrivait Virginia Woolf dans Une chambre à soi. Et si elle était là la suite ? Glorifier non plus cet état qui ne dure qu’un instant mais la vie qui suit ? Les luttes oui, faire des choses pour les autres souvent avant de penser à soi oui, mais surtout devenir celle qu’on aspirait à être lorsque nous y rêvions allongées sur un lit les yeux Des choses que je recommande Bonne année Les Glorieuses ! « À Lille, le musée des Beaux-Arts a fait l’inventaire de ses collections : sur 60 000 œuvres, seules 135 étaient signées par une femme ». Comment efface-t-on les femmes de l’histoire de l’art ? En érigeant le génie artistique comme masculine, en ne finançant pas les réseaux d’artistes femmes. La conséquence : alors qu’elles étaient connues de leur vivant, elles sont tombées peu à peu dans l’oubli après leur mort. L’exposition, elle, est visible jusqu’au 11 mars. « Les femmes sont diagnostiquées plus tard que les hommes pour 700 maladies différentes »: les femmes moins bien soignées que les hommes, selon le Forum économique mondial. L’exposition GRACE WEAVER Hotel Paintings à la Galerie Max Hetzler (46 et 57, rue du Temple, Paris) – jusqu’au 17 février. L’exposition Elliott « Anatomie d’une chute » et la question de l’interprétation du récit sur The Conversation. Enquête – Louis Althusser et Hélène Rytmann : le philosophe assassin et le féminicide occulté. Les voeux de Lola Lafon : « En 2024, ne plus être courageuses ni formidables, » // Message Partenaire // Découvrez Music Queens, l’émission pop culture féministe diffusée sur Arte.tv. Rebecca Manzoni y décortique en trois minutes comment une chanson est devenue une hymne des mouvements féministes.
*** Un message de notre partenaire, ARTE *** Pour regarder Music Queens, c’est ici : https://www.arte.tv/fr/videos/093019-004-A/music-queens/?at_campaign=SCW24280&at_medium=email_marketing&at_support=MusicQueens Vous pouvez retrouver l’ensemble des épisodes, ainsi que des milliers d’autres programmes, gratuitement et sans abonnement sur arte.tv.
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