Bienvenue dans la newsletter Les Petites Glo où on apprend à changer le monde même quand on n’a ni pouvoir ni argent. Recommandez cette newsletter à votre ami·e pour qu’il ou elle fasse bouger les choses aussi. Nous avons également trois autres newsletters qui pourraient vous intéresser, Les Glorieuses mais aussi la verticale Economie et IMPACT. Mardi 2 mars 2021 “Être féministe et filmer des vidéos beauté, c’est pas incompatible !“Le week-end dernier, je me baladais sur les réseaux sociaux quand je suis tombée sur cette photo. Une jeune femme, genou à terre, demandant son mec en mariage. Bon, ok, c’était pas n’importe quelle jeune femme. C’était Romy – Romane, pour les intimes – créatrice de contenus de 23 ans suivie par quelque 1,6 million d’abonné.e.s sur Instagram. Vous la connaissez sûrement si vous êtes connecté.e.s ; moi, j’ai d’abord tilté en pensant au fait que, dans ma dernière newsletter, je vous racontais l’histoire d’une autre Romy, drôle de coïncidence, non ? Et puis, après ma parenthèse “dis, c’est vrai qu’il est joli ce prénom“, j’ai passé beaucoup de temps sur son profil. Après son bac, Romane s’est lancée sur les réseaux sociaux pour gagner un peu d’argent afin de se payer une école de design graphique. Elle y était depuis ses 16 ans, mais elle a décidé de s’y mettre à plein temps, de voir ce que ça donnerait. Résultat : aujourd’hui, elle en vit, et elle adore ce qu’elle fait. Je n’ai “que“ 30 ans mais je suis assez vieille pour dire que ce choix de vie n’existait pas vraiment quand j’ai passé mon bac. Et je suis assez vieille pour dire que je ne le comprends pas tout à fait, moi qui ai créé une page Insta en janvier 2020, après avoir vécu plusieurs années sans y mettre les pieds. Alors, j’ai voulu discuter avec Romane pour savoir qui se cache derrière ces photos où (presque) rien ne dépasse, et elle a gentiment accepté de répondre à mes questions (de boomeuse).
Très bien ! Quand j’étais ado, on me disait “les choses sont comme ci“, “les choses sont comme ça“, mais en grandissant, j’ai commencé à me faire ma propre opinion. Avec cette demande en mariage, j’ai voulu casser le code qui voudrait que c’est à l’homme de demander. Pour moi, quand deux personnes s’aiment, qu’importe leur genre, elles peuvent se demander en mariage autant l’une que l’autre ! C’était à la fois pour encourager les filles qui aimeraient se marier mais qui attendent que leur copain leur propose, mais surtout parce que j’en avais envie ! Après, même si j’ai eu beaucoup de retours positifs sur mon post, j’ai reçu des vraies critiques, des personnes qui disent “pourquoi elle fait ça ?“, “les traditions, on n’y touche pas“… Je m’en fiche !
Ça dépend des moments, j’ai eu différentes phases. À la base, je suis assez introvertie, hypersensible, mais en arrivant au collège, j’étais un peu virulente, j’avais besoin de faire la grande gueule, c’était ma façon d’extérioriser les choses en essayant de montrer que j’étais forte alors que je ne l’étais pas forcément. J’étais assez cassée de l’intérieur car j’ai vécu beaucoup de choses difficiles assez jeune… En tout cas, je n’étais pas aussi engagée que maintenant ! Quand j’étais ado, par exemple, si je voyais une fille avec des poils sous les bras, je rigolais… alors qu’il n’y a rien de drôle, rien de sale, c’est normal. Il m’a fallu un peu de temps pour m’en rendre compte.
En fait, j’ai toujours eu ce côté féministe sans le savoir mais, aujourd’hui, je n’ai pas honte de le dire, je suis fière de l’être ! Plus jeune, j’avais une fausse image de ce que c’était, pleine de clichés justement, comme si les féministes n’étaient que des hystériques avec des poils sous les bras. Finalement, je me suis aperçue que c’est presque toujours les hommes qui véhiculent cette image-là, pour décrédibiliser le féminisme.
C’est tout simplement l’égalité entre les hommes et les femmes, et je pense qu’on
J’essaie de faire en sorte que ça ne m’atteigne pas ! Elles ne viennent pas seulement des hommes, d’ailleurs. Avec les filles, c’est plutôt ce que j’appelle des “méchants compliments“, du genre “oh, t’as un petit bidou, ça te va bien !“ ou “t’as pris du ventre, t’es enceinte ? Je suis contente pour toi !“ alors que non, pas du tout, je ne suis pas enceinte, j’ai juste pris un peu de poids. C’est fou cette pression du bébé qui revient constamment quand on est une femme… Cette ©Romy
Ah oui, j’ai direct compris qu’il était comme ça, vraiment ouvert d’esprit et différent des garçons que j’avais connus avant. J’ai trop été en couple avec des machos, des personnes sexistes… Malheureusement, j’ai beaucoup de choses à dire sur la masculinité toxique. J’ai connu le mec qui te dit “Tu sors pas habillée comme ça, avec une jupe“, qui monte dans les tours, avec qui ça part en clash en deux secondes. Le fait de suivre des comptes comme Simone Media, Period Studio, ça m’a permis de m’alerter sur des mots, des choses que je ressentais. Quand j’ai rencontré mon copain, j’avais tendance à lui dire “t’es comme une fille“, parce que j’avais jamais connu un tempérament pareil, j’avais l’impression que ça existait pas les mecs comme ça… Mais non, ça n’a rien à voir avec le fait d’être “comme une fille“, c’est juste normal au final !
Ma mère est un modèle pour moi. Même si elle ne le disait pas forcément, elle a toujours été féministe, je le voyais dans ses actions. Elle a fait beaucoup de choses par elle-même : c’est une maman de quatre enfants qui les a éduqués toute seule, qui n’a pas eu peur de quitter son foyer quand ça n’allait pas avec son mari. Elle faisait des petits boulots pour subvenir à nos besoins… Même quand elle était enceinte, elle travaillait dans les champs de melon… C’est elle qui m’a appris que j’avais le droit de penser ce que je veux. Elle me disait “si un homme te coupe la parole, tu affirmes ce que tu dis, tu ne lui laisses pas ta parole“ ! Je pense que ça change les choses de grandir entourée de femmes. D’ailleurs, mon petit frère, qui a 14 ans, est un peu féministe grâce à nous. On lui a appris que les règles n’étaient pas sales, on l’a alerté au maximum, on l’a sensibilisé à plein de sujets, notamment au respect des femmes.
Oui, c’est encore un tabou et je le vois bien parce que sur mes réseaux, je parle beaucoup de culottes menstruelles. Quand j’ai eu mes premières règles, le discours que j’ai entendu c’était “quand tu débutes, il y a les serviettes, et ensuite tu passeras aux tampons“. J’avais cette pression de devoir passer aux tampons alors que je n’étais pas à l’aise avec ça… J’aurais aimé qu’on me présente d’autres options, c’est pourquoi je le fais aujourd’hui, parce que ça a tout changé pour moi ! Mais voilà, je lis souvent que “les culottes de règles, c’est sale“, que “les règles, c’est un sujet intime, il ne faut pas en parler“… C’est sûr que les mentalités doivent évoluer mais j’ai quand même l’impression que ça va dans le bon sens.
On peut tout à fait être féministe et filmer des vidéos beauté, c’est pas incompatible ! Ce serait vraiment simpliste de résumer le féminisme à l’apparence, chacun le ressent comme il le veut, ça se passe à l’intérieur de soi. Moi, je me sens féminine en ayant des poils, je m’épile quand je veux, quand moi je le sens. Pareil pour le maquillage, parfois j’en ai envie, parfois j’en n’ai pas envie… Je n’ai pas toujours ressenti ça, c’est un travail d’acceptation qui s’est fait au fil des années. Quand on me demande “et ton copain, il le vit comment ?“, je réponds qu’il n’a rien à dire et qu’il m’accepte comme je suis. La question de l’épilation revient beaucoup, beaucoup, beaucoup… Des filles m’écrivent “Je sais que je dois être clean de partout“, mais comment ça “clean“ ? Non ! Il faut que chacune se sente bien, comme elle en a envie.
Je ne me vois pas du tout comme un modèle. Je mets en avant ce que je pense, quitte à me faire critiquer. Pendant longtemps, je me suis basée sur ce qu’on me disait pour me construire. Je pensais “c’est comme ça, et pas autrement“, parce qu’à cet âge, on pense qu’on est une grande et qu’on a tout compris. Mais on continue d’évoluer, notre façon de penser aussi, et tant mieux ! Donc c’est plutôt ça que je voudrais faire passer à celles qui me suivent : il ne faut pas rester butée mais réfléchir par-dessus ce qu’on vous dit et élargir son esprit.
Au collège ou au lycée, jamais de ma vie je n’aurais osé ne pas porter de soutien-gorge ! Il y a une vraie pression à l’école, on ne laisse pas d’autres choix aux filles, c’est soutif, point barre. Mais tant que tu n’empiètes pas sur la liberté des autres, tu fais ce que tu veux ! Sur les réseaux sociaux, on est un peu plus alertées, on parle du “no bra“, mais encore une fois c’est le regard des garçons qui décide de tout. Et même les filles se font des remarques entre elles quand elles voient un téton qui pointe à travers un tee-shirt alors que ça ne devrait pas les choquer, elles ont les mêmes… Il faut vraiment continuer à éduquer là-dessus.
Oh oui ! Sans hésitation ! Déjà quand j’étais ado, que mon corps commençait à évoluer, je connaissais le harcèlement de rue, et pas forcément en étant en jupe, je précise ! Même en portant un bon gros jogging, certains hommes me déshabillaient du regard, d’autres me sifflaient, alors que j’avais vraiment l’air d’une gosse. J’en parle souvent sur les réseaux sociaux, car l’éducation c’est la clé. Il faut en parler, et surtout apprendre à réagir quand on est témoin de harcèlement. Récemment, on a organisé un live pour parler du programme Stand Up, pour expliquer comment on peut intervenir dans une situation de harcèlement sans se mettre en danger. Sur les réseaux sociaux, ça s’est amplifié et c’est même pire, tu te sens plus attaquée, même salie. Dans le tome 3 de mon livre (Dans la p’tite vie d’une étudiante (ou pas), édition Les Livres du Dragon d’Or), je parle beaucoup de la dick pic, le fait de recevoir une photo des parties génitales d’un homme sans consentement. Quand j’en recevais, avant même d’avoir une grosse communauté, la réaction des gens autour de moi était soit “ah, c’est rigolo, montre !“, soit “oh, ça va, on en reçoit tous !“… Mais non, ce n’est pas normal ! Ni de réagir comme ça, ni de recevoir ça ! Ce qui m’est arrivé aussi, c’est des mecs qui créent des serveurs privés où ils mettent des photomontages pornographiques avec ta tête sur un corps qui n’est pas le tien. Tu vois que c’est faux mais tu as l’impression que c’est toi, c’est horrible… J’essaie au maximum de partager des messages positifs sur mes réseaux sociaux, mais je veux vraiment alerter là-dessus. Il y a des filles de 13 ans qui me disent qu’elles veulent se lancer sur YouTube, être influenceuses : ça me fait peur. Quand je vois ce que je reçois à 23 ans, l’impact que ça a même si je suis bien entourée, je me dis que c’est vraiment dangereux pour des personnes plus jeunes, fragiles, ça peut complètement détruire ta confiance en toi.
Internet a un côté très beau, certes, mais aussi un côté très malsain. Sur les réseaux, on ne montre que le haut de l’iceberg, la bonne partie de notre vie, sauf qu’il y a toute la partie sous l’eau, plein de choses qu’on ne peut pas exprimer. Et même en faisant appel à des avocats, comme ça m’est déjà arrivé, on n’arrive pas à remonter jusqu’aux personnes qui nous font du mal, c’est malheureusement très compliqué de se protéger. Il faut vraiment que les plus jeunes aient ça en tête : faites attention à tout ce que vous postez car, même s’ils ne sont pas en majorité, il y a des gens très malveillants. Une fois, dans une story, j’avais dit que mon copain n’était pas là le soir : des grands gaillards ont débarqué devant chez moi, j’ai eu super peur. Aussi, dès le collège maintenant on s’envoie des nudes, ça se faisait beaucoup à mon époque déjà. Je me souviens d’une fille qui a été détruite parce que la photo de sa poitrine avait tournée, jusqu’au proviseur ! Chacun est libre de faire ce qu’il veut, c’est sûr, mais il faut vraiment faire attention aujourd’hui, il y a des traces de tout…
Non ! J’avais fait une collab’ avec une marque de lingerie et de maillots de bain, et justement des hommes avaient fait des trucs sales sur mes photos. Mon avocate m’avait dit : “Il suffit de les supprimer !“. Je n’ai pas accepté… La supprimer, ça aurait été comme leur donner raison, alors que le problème ne venait pas de ma photo mais de leur regard ! Si on veut faire évoluer les mentalités, on ne le fera pas en enterrant le problème, mais en éduquant les gens.
Je leur conseillerais surtout de parler de tout ça autour d’eux, pour éveiller les consciences. Parler avec les garçons mais aussi les filles qui peuvent être un peu formatées sur certains sujets. Je me souviens d’une copine qui m’avait dit un truc grave : “Mon copain m’a foutu une tarte, mais en même temps je lui avais mal
C’est un peu bizarre, je sais pas trop… mais mon moi du futur, j’aimerais le voir encore plus affirmé ! Je m’affirme déjà pour plein de sujets mais, par exemple, je voudrais savoir mieux gérer mon hypersensibilité, en faire une force. Pendant longtemps, au contraire, j’ai eu tendance à me rabaisser à cause de ça. Concernant le féminisme, j’ai envie d’en apprendre toujours plus, de faire les choses au mieux. Et évidemment, je voudrais qu’on avance beaucoup plus sur des problématiques comme le racisme banalisé, l’homophobie… Je reste quand même optimiste, c’est important. Même si souvent je me dis “wow“, là on recule sur des gros thèmes, je pense qu’on fait quand même des progrès, non ? *Romy est ambassadrice du programme Stand Up par L’Oréal Paris Un mot de notre partenaire, L’Oréal Paris sur le programme Stand up contre le harcèlement de rueEn France, 81 % des femmes ont déjà été victimes de harcèlement sexuel dans les lieux publics et seulement 20 % d’entre elles déclarent avoir été aidées par un témoin*. Mais comment réagir ? Stand Up est un programme international de formation créé par L’Oréal Paris en partenariat avec l’ONG Hollaback! et la Fondation des femmes, qui permet d’apprendre à intervenir lorsqu’on est témoin ou victime de harcèlement sexuel dans les lieux publics, sans se mettre en danger. Basé sur la méthodologie des « 5D » (Distraire, Déléguer, Dialoguer, Diriger et * Sondage mené par L’Oréal Paris et Ipsos en mars 2019, « Sondage mondial sur le harcèlement sexuel dans les lieux publics ». – Par L’Oréal Paris, en partenariat avec Hollaback! et la Fondation des Femmes par @valerieCG Les recommandations de ChloéEN-FIN ! Les protections périodiques seront gratuites à la rentrée de septembre 2021 pour toutes les étudiantes ! La ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, a annoncé que des distributeurs seraient installés dès les semaines à venir, notamment au sein des résidences et des services de santé universitaires, ajoutant que le gouvernement “vise 1500 distributeurs et une gratuité complète à la rentrée“. Bravo et merci à toutes celles et ceux qui se sont battu.e.s pour en arriver là ! #stopprécaritémenstruelle J’ai d’ailleurs répondu à Christine Mateus du journal Le Parisien, dans un article qui rappelle que jusqu’en 2016… les protections périodiques n’étaient pas des produits de première nécessité. Les règles, Louise Mey et Klaire fait Grrr en parlent tellement, mais tellement bien dans Chattologie, leur “essai menstruel avec des dessins dedans“. Le livre est une adaptation de la pièce de théâtre du même nom, et il est tout pareil : léger, sérieux, drôle, très drôle (#ChattesAndFurious), indispensable. À 24 ans, Glass Marcano est devenue la première femme noire à diriger un orchestre symphonique en France ! Ruby est une petite fille transgenre de 12 ans. Pour qu’elle se sente libre et heureuse d’être qui elle est, son papa Jamie a créé Rubies, une collection de maillots de bain adaptés aux enfants trans et non-binaires. “Dans ce milieu, on sexualise constamment des gamines de 16 ans sans que personne ne voie le problème.“ Le Monde consacre un article à la culture sexiste des écoles de cuisine : il est (malheureusement) payant, mais très intéressant. Soyez au taquet dans deux jours les Petites Glo : une nouvelle revue féministe débarque, La Déferlante, avec pour promesse d’observer et questionner la société post #metoo. Mardi prochain, le 9 mars, une conférence en ligne aura lieu de 10h30 à 12h sur le thème « Universités et grandes écoles : l’égalité femmes-hommes c’est pour quand ? ». L’inscription est gratuite (ici) et ça s’annonce passionnant. Et pour découvrir le superbe documentaire réalisé par Daphné Leblond et Lisa Billuart Monet, pas besoin d’attendre ! Le DVD de Mon nom est clitoris sort aujourd’hui et il FAUT l’avoir vu (il sera aussi dispo en VOD le 2 avril). Les dernières newsletters Gloria MediaL’importance de la joie militante, Les Glorieuses, 24 février 2021 La révolution de l’amour, Les Glorieuses, 17 février 2021 Romy, 12 ans, bi, et alors ?, Les Petites Glo, 16 février 2021 Orgueil et Préjugés, Economie, 14 février 2021 L’intuition était-elle bonne ?, Les Glorieuses, 10 février 2021 Les Polonaises n’ont plus peur, IMPACT 25 janvier 2021 |
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