La grande quête Pour lire la newsletter en ligne https://lesglorieuses.fr/la-grande-quete/ Pour toutes les nouvelles personnes qui ont rejoint cette communauté de lectrices et lecteurs pendant l’été, je m’appelle Rebecca Amsellem et j’écris chaque semaine cette newsletter depuis presque neuf ans. J’y partage des réflexions intellectuelles, des * Si on vous a transféré cette newsletter, vous pouvez vous abonner ici pour la recevoir tous les mercredis (sauf pendant les vacances) (ou si ça tombe le jour de mon anniversaire). * Et parce que c’est la rentrée, vous trouverez un concours pour gagner un livre de la rentrée littéraire à la fin de la newsletter Une femme sous influence, de John Cassavetes, avec Gena Rowlands, 1974 « Les êtres humains sont des magiciens qui s’ignorent », explique l’écrivaine Nancy Huston (L’Espèce fabulatrice, Actes Sud, 2008). Car toute nomination – à savoir l’acte de nommer quelque chose d’une certaine manière – est un acte magique. Elle donne du sens à du rien. « L’argent est une fiction : de petits bouts de papier dont on a décrété qu’ils représentaient l’or. L’or est une fiction. Dans l’absolu, il ne vaut pas plus que le sable. » Et d’ajouter : « Ce ne sont pas des mensonges, car nous y croyons en toute bonne foi. C’est dans notre intérêt d’y croire. » L’être humain peut tout accepter, nous dit Nancy Huston, ou presque, car il y met un sens. D’ailleurs, il ne peut faire autrement. « Notre spécialité, notre prérogative, notre manie, notre gloire et notre chute, c’est le pourquoi » (ibid.). Trouver du sens au point de devenir fou : c’est ainsi que le personnage de Charles Arrowby, metteur en scène de théâtre du roman d’Iris Murdoch, La Mer, la mer, Gallimard, 1983 (la version poche n’est plus éditée mais je vois qu’on peut l’acheter d’occasion ici, sinon vous pouvez demander à votre libraire une version reliée), va voir sa quête de sens le mener à la folie. Lorsqu’il décide de s’isoler dans une maison en bord de mer sans électricité, Charles Arrowby n’a pour but que de vivre en solitaire, échapper aux fantômes de son passé, écrire (un peu) et manger (simplement, mais beaucoup). Mais quand il croise son grand – et unique – amour Hartley pour la première fois depuis des dizaines d’années, il tourne à l’obsession : la sauver d’un mariage qu’il juge triste, sans vie et même violent. Elle a beau lui demander de la laisser tranquille, il devient obsédé par sa reconquête : il doit la sauver. Il n’a aimé qu’elle après tout. Et c’est parce que leur rencontre a lieu dans cet endroit improbable, loin de leurs villes natales, si longtemps après leur dernière rencontre, que Charles est persuadé qu’il ne peut s’agir d’une coïncidence. « C’est le destin », pourrait-on l’entendre dire ou « cela ne peut être le hasard ». Collage, papiers, par moi-même, 2024La quête de Charles Arrowby pour récupérer son grand amour est un précipité de notre besoin de faire sens. « Je ne crois pas au hasard, écrit Nancy Huston : un excellent résumé de l’histoire de notre espèce. » Même lorsque l’ambition de Charles Arrowby laisse place à une forme d’égarement, il préfère interpréter les « signes », les « hasards », les « connections » au regard de ses désirs. « C’est ainsi que fonctionnent les fous, pour reprendre les mots d’un des personnages de La Mer, la mer, ils transforment tout en preuve de ce qu’ils veulent croire. » Si nous sommes incapables de mettre du sens dans le monde, mais que l’interprétation systématique du réel selon nos propres illusions est parfaitement humaine, quelle est la fin de la quête de sens, inhérente à notre espèce humaine, et le début d’une folie qui transforme tout – et surtout n’importe quoi – en « preuve » ? À la conscience que nous faisons partie de l’Espèce fabulatrice, aurait pu répondre Nancy Huston. « Les Huns, les Mongols, les nazis, les membres du NKVD – barbares du Nord et du Sud, d’hier et d’aujourd’hui – étaient fermement convaincus de vivre dans le réel, alors que leur tête bourdonnait de mythes (historiques, biologiques, scientifiques) pour rationaliser, justifier et glorifier leurs déprédations, leurs massacres, leurs spoliations, leurs bains de sang. » Et de continuer : « Les gens qui se croient dans le réel sont les plus ignorants, et cette ignorance est potentiellement meurtrière. » Et peut-être que le salut de cette quête de sens, celui de Charles Arrowby, celui de n’importe quelle personne qui, un jour, à eu besoin de faire sens d’expériences peut se retrouver dans ces mots de l’écrivaine et philosophe Iris Murdoch issus d’un portrait dans Times (1983) : « Nous vivons dans un monde fantastique, un monde d’illusion. La grande tâche dans la vie est de trouver la réalité. Mais étant donné l’état du monde, est-ce sage ? » Des choses que je recommande Cet été, j’ai lu la chance de lire des chefs d’oeuvres. En même temps, normal, puisque lors que je suis entrée dans la librairie Le 5ème Art j’ai demandé « des chefs d’oeuvres ». Presque tous m’ont été conseillées par les merveilleuses libraires qui y officient – La mer, la A quoi sert la philosophie de l’intime ? A s’extraire de ses obsessions. A adoucir les peines du monde. A légitimer ce qu’on nous a apprit à juger dérisoire. Ecoutez une Masterclasse de France Culture avec la philosophe Claire Marin. Et vous pouvez retrouver son entretien dans la newsletter ici. Le WeToo Festival #5 revient pour sa 5e édition du 11 au 15 septembre au Point Fort et au centre culturel Nelson Mandela – (Métro Fort d’Aubervilliers). Le WeToo c’est un festival féministe, familial et pluridisciplinaire pour fêter ensemble la révolution féministe! C’est une programmation de feu, plus de 40 propositions, avec des artistes incroyables, des penseureuses inspirant.e.s, une tarification basse et responsable, une garde d’enfant gratuite, des ateliers, des tables rondes, des spectacles ados, enfants, adulte, des concerts, un WeToo Comedy Club, un grand bal, des djsets… Cette année, Les Glorieuses s’associent au WeToo en participant à une table ronde sur La Séparation Féministe modérée par Fabiola Dor : peut-on envisager des ruptures affranchies du Patriarcat ? On vous attend le samedi 14 à 16h au Point Fort. Retrouvez toute la programmation et réservez vos places : https://wetoofestival.fr C’est LA série de l’été et elle est publiée sur Le Monde : Marguerite Duras, l’éternelle mythologie, en 6 six épisodes par Béatrice Gurrey. Projet il reste encore demain // Voici la page sur laquelle les profs de collèges et lycées peuvent faire la demande (il ne reste encore que quelques places) : https://lesglorieuses.fr/operation-il-reste-encore-demain/ (n’hésitez pas à transférer le lien aux profs que vous connaissez) *** Si vous avez des suggestions de livres, d’articles, de séries, de films à mettre ici, envoyez-moi les par retour d’email. MERCI *** *** Concours en partenariat avec Les Editions du Seuil *** Gagnez Le bleu n’abîme pas d’Anouk Schavelzon (rentrée littéraire) « Il faut bien raconter les histoires. Le bleu n’abîme pas est le premier roman d’Anouk Schavelzon (Editions Seuil / Fiction & Cie), il est paru le 19 août dernier. S’il vous intéresse, vous pouvez tenter de gagner en répondant à cet email et en précisant votre couleur préférée. Ce concours vous est proposé par notre partenaire, les Éditions du Seuil.
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