![]() ![]() Bienvenue dans la newsletter Impact : votre guide de la révolution féministe mondiale. Cette semaine, nous vous emmenons au Brésil, où des milliers de femmes autochtones se réunissent tous les deux ans pour exiger la justice pour leurs communautés. Vous êtes pressé·es ? Voici la newsletter en bref :
Pour rester informé·e de toutes les actualités sur les inégalités de genre, suivez-nous sur Instagram et LinkedIn. Vous pouvez lire la newsletter en ligne ici – http://lesglorieuses.fr/la-marche-des-femmes-autochtones ![]() “C’est nous qui sommes en première ligne” : les femmes autochtones du Brésil marchent pour la justice Par Jill Langlois En 2021, il n’y avait aucun bruit dans le bus en route pour la Marche des Femmes Autochtones. D’habitude, le trajet de 15 heures de Belo Horizonte à Brasília est rythmé de chants spirituels et d’histoires racontées par des dizaines de femmes qui représentent une fraction des 305 peuples autochtones du Brésil. Mais cette année était différente. Les masques qu’elles portaient pour se protéger du Covid-19 rendaient les échanges difficiles, et l’objectif de leur voyage ce septembre-là était particulièrement sombre. Un mois plus tôt, Daiane Griá Sales, une fille de 14 ans du peuple Kaingang, et Raissa da Silva Cabreira, une fille Guarani-Kaiowá de 11 ans, avaient été agressées sexuellement et tuées dans deux régions distinctes du Brésil. Cette fois, le groupe se rendait à l’événement – qui réunit des milliers de femmes des quatre coins du pays pour mettre en lumière les abus sur leurs droits, l’importance de l’égalité des genres et la préservation des cultures autochtones – pour obtenir justice pour ces jeunes filles autochtones, pour toutes celles qui les ont précédé·es et pour celles qui, elles en étaient tristement certain·es, leur succèderaient. La Marche nationale des femmes autochtones de 2021. Photo: Verônica Holanda/Cimi. CC BY-SA “La Marche arrête l’invisibilisation des femmes et des filles autochtones”, explique Avelin Buniacá Kambiwá, qui était dans le bus pour Brasília ce jour-là. “Au sein du mouvement autochtone plus largement – la lutte pour le territoire, la démarcation, la lutte contre l’exploitation et les invasions – les femmes finissent par être invisibilisées, alors que c’est nous qui sommes en première ligne. Alors que ce sont nos filles qui paient le prix le plus élevé. Nous ne pouvons pas laisser Daiane et Raissa être oubliées et nous ne pouvons pas laisser une chose pareille se reproduire.” Selon une étude menée par l’Université fédérale du Paraná en partenariat avec le ministère des Peuples Autochtones, 394 femmes et adolescentes autochtones ont été victimes de féminicides entre 2003 et 2022. Parmi elles, 149 ont été tuées dans l’État du Mato Grosso do Sul, où a été tuée Raissa da Silva Cabreira. Le niveau extrême de violence dirigée contre les femmes et les filles autochtones à travers le Brésil est une réalité dont ces femmes sont conscientes depuis longtemps. Mais elles sont aussi convaincues que le monde extérieur n’y a pas prêté l’attention qu’elles méritent. La première marche a eu lieu en 2019. Photo: Katie Mähler/Apib Comunicação. CC BY-SA 2.0. “Nous savions qu’il fallait faire quelque chose pour nous protéger nous-mêmes et pour se soutenir mutuellement”, affirme Avelin Buniacá Kambiwá. “Quand nous, en tant que femmes autochtones, décidons de sortir et de nous faire entendre, sous notre propre bannière et en nous concentrant sur des problèmes différents en fonction des vécus de chacune, nous pouvons donner plus de visibilité à la cause et, surtout, plus de courage pour parler de ce qui se passe et de le dénoncer.” Ce manque d’attention porté aux vies et au bien-être des femmes et des filles autochtones, ainsi que l’importance de leur rôle dans la protection de leurs propres cultures et de leurs territoires, est ce qui a poussé l’Articulation nationale des femmes autochtones guerrières ancestrales (ANMIGA) à organiser la première Marche des Femmes Autochtones en 2019. Cette organisation, composée de femmes autochtones de toutes les régions du pays, rassemble les savoirs, les traditions et les luttes de ses membres. Elle est devenue une référence pour créer un dialogue autour des droits et des rôles des femmes autochtones, au sein d’un groupe dirigé par les premières concernées. Désormais dans sa quatrième édition, la Marche, qui a lieu tous les deux ans, n’est pas seulement un espace pour que les femmes autochtones se rassemblent entre elles et discutent des enjeux les plus urgents auxquels elles font face. Elle vise également à mettre la pression sur les élu·es et autres décideur·euses afin d’amener un vrai changement. En 2023, une séance officielle a été organisée à la Chambre des députés en l’honneur de la marche. Photo: Gian Martins/Mídia NINJA. CC BY-SA Le premier jour de la Marche de 2023, plus de 500 femmes autochtones ont occupé le Congrès national et assisté au dépôt du projet de loi 4381/2023 par la députée autochtone Célia Xakriabá. Le texte dessine une politique de lutte contre les violences faites aux femmes autochtones. C’était la première fois dans l’histoire du parlement brésilien qu’un projet de loi était traduit dans une langue autochtone. “Là où il y a lutte, nous allons, là où des femmes crient, nous allons”, la députée a déclaré ce jour-là. “Défendre les femmes autochtones, c’est défendre la terre ; c’est défendre la planète.” Un autre moment historique de la Marche de 2023, qui a réuni environ 8 000 femmes, a eu lieu le dernier jour, où à l’occasion d’une table ronde, cinq ministres, dont ceux des Peuples Autochtones et des Femmes, ont signé une série d’actes visant à mettre en œuvre des politiques publiques pour protéger les femmes autochtones. Certaines de ces mesures ciblaient particulièrement les femmes vivant des situations de violence avec des services spécialisés répondant aux besoins spécifiques des femmes vivant sur des territoires autochtones. L’ANMIGA espère que la Marche des Femmes Autochtones de cette année aura un impact tout aussi important. Intitulée “Nos corps, nos territoires”, elle est prévue du 4 au 8 août et, pour la première fois, sera accompagnée d’un événement partenaire : la première Conférence nationale des femmes autochtones, dont le thème inaugural sera “Lutter contre les violences faites aux femmes autochtones”. Près de quatre ans après le meurtre de Daiane Griá Sales, l’homme qui l’a agressée sexuellement puis tuée a été condamné à 36 ans de prison. Avelin Buniacá Kambiwá souligne qu’il est extrêmement rare qu’un homme blanc soit condamné pour ce type de crimes contre une fille autochtone. “Je vais à chaque Marche pour ma mère, pour ma grand-mère, pour mon arrière-grand-mère, et pour celles qui viendront : mes filles, mes petites-filles, mes arrière-petites-filles”, déclare Avelin Buniacá Kambiwá. “Je fais partie de ce mouvement en l’honneur et au service des femmes – de ce que nous sommes et de ce que nous serons. C’est presque un devoir d’être ici.” Watatakalu Yawalapiti, une femme de peuple Xingu. Photo: Douglas Freitas /Cobertura Colaborativa/Apib Comunicação. CC BY-SA 2.0. ![]() À propos de nousImpact est une newsletter hebdomadaire dédiée aux droits des femmes et des minorités de genre dans le monde entier. Vous aimez la newsletter ? Pensez à faire un don. Votre soutien nous permettra de financer cette newsletter et de lancer des nouveaux projets. ![]()
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