Mardi 21 septembre 2021 Who run the world ?– L’heure est venue pour nous d’entrer dans l’histoire, ajouta Ava. Depuis plus de cinquante ans, les terminale du lycée William McKinley se réunissaient à Memorial Park le premier vendredi de la rentrée scolaire pour graver leurs noms dans le métal de la vieille cage à écureuil. Ce soir, Ava Morgan, CJ Jacobson, Jordan Schafer et Martha Custis allaient s’ajouter à la liste de la promotion 2020. Malheureusement, la situation était sur le point de se compliquer. Dans Un fabuleux destin, premier roman de Sarah Watson, la créatrice de la célèbre série The Bold type, quatre amies se lancent dans leur premier combat politique afin d’empêcher la démolition imminente du parc municipal où elles se sont rencontrées quand elles avaient cinq ans. Et ce qui est passionnant, c’est que parmi Jordan, la rédactrice en chef du journal du lycée, Ava qui souhaite intégrer les Beaux-arts et retrouver sa mère biologique, CJ, l’élève brillante qui rate son concours d’entrée à l’université, et Martha qui vient de faire son coming-out et cumule les petits boulots pour payer ses études, se trouve… la future présidente des États-Unis. L’autrice l’annonce dans un court prologue puis maintient le suspens sur son identité pendant près de 400 pages. C’est à la fois très réussi et très réjouissant. Parce qu’aujourd’hui, seules 21 femmes sont cheffes d’État ou de gouvernement sur les quelque 200 pays qui composent notre planète. Who run the world ? Pas vraiment les girls, en réalité. Alors comprenez que la lecture d’un roman qui laisse sa chance à quatre ados de prendre la place d’un vieil homme blanc (ou orange) hétérosexuel, ça laisse rêveuse. Avant d’en arriver à cette partie de l’intrigue, la bande d’amies commence donc par s’engager localement, en se confrontant à un conseiller municipal plutôt méprisant. Je ne vous en dis pas plus car je ne veux pas vous spoiler mais, finalement, c’est en agissant pour le bien de sa vie de quartier que l’une des héroïnes va développer l’envie d’agir pour son pays entier. Est-ce toujours comme ça que ça commence ? J’ai voulu poser la question aux deux plus jeunes maires de France : Hugo Biolley, élu maire de Vinzieux (Ardèche) en mai 2020, à l’âge de 19 ans ; et Ophélie Escot, maire de Cette-Eygun (Pyrénées-Atlantiques), également élue l’an dernier à l’âge de 22 ans. En plus de ses activités de maire, Ophélie Escot vient de s’installer sur l’exploitation familiale. Après ses études (un bac scientifique puis un BTS en sciences et technologies des aliments), elle a pris le temps de réfléchir à celle qu’elle voulait vraiment devenir : éleveuse de brebis et de vaches dans son petit village de 80 habitants. En pleine période de transhumance, perchée dans les montagnes, il n’a pas été simple de la joindre. Quand j’arrive enfin à la contacter et que je lui explique le thème de cette newsletter, elle me répond avec humour : “Je vous préviens, je ne compte pas devenir présidente de la République française, et encore moins des États-Unis !“ En fait, l’élection d’Ophélie s’est décidée au dernier moment. “Ce n’était pas du tout prémédité, me raconte-t-elle, mais je me suis toujours intéressée à la vie de mon village et quand j’ai vu que l’ancien maire et son adjoint ne souhaitaient pas se représenter et qu’il n’y avait personne pour les remplacer, je me suis dit que ce n’était pas possible de laisser la commune comme ça. On nous avait déjà retiré l’école, les petits services publics, l’agence postale… Je n’envisageais pas qu’on puisse se retrouver sans mairie.“ Désormais, Ophélie est un véritable “couteau suisse“. “Pour moi, c’était une découverte totale. On ne se rend réellement compte de l’engagement qu’on a pris et de la charge de travail que ça représente qu’une fois qu’on y est réellement. Il faut qu’on s’intéresse à tout : de la rénovation d’une partie d’un réseau d’eau à la gestion d’un éboulement… Un mois après mon élection, j’ai dû gérer un grand incendie au cœur du village. C’est ça qui me plaît, on ne s’ennuie jamais !“ Ce n’est pas Hugo Biolley qui dira le contraire. Étudiant à Sciences-Po Grenoble, ses semaines sont bien chargées : “Le lundi et le mardi, je me consacre à mes études, puis le mercredi après-midi je rentre à Vinzieux pour m’occuper des dossiers que je ne peux pas gérer à distance, détaille-t-il. C’est un rythme intense et c’est passionnant car il n’y a pas deux semaines qui se ressemblent.“ Quand il a été élu, deux personnes sont venues le voir avec la volonté d’ouvrir un commerce. Dans sa commune de 500 habitants, il n’y en avait pas. “Ils m’ont dit ‘On est tombés amoureux de votre village et on a envie de s’installer ici’. J’avais vraiment envie de dynamiser Vinzieux alors, début octobre, ce sera chose faite : on ouvre un bar à vin et chocolat !“ En discutant avec Hugo Biolley et Ophélie Escot, tout semble relativement simple. Ophélie Escot, la plus jeune maire de France Pourtant, leur jeune âge a suscité de la méfiance et des critiques. “La question qu’on m’a posée tout le temps avant que je sois élu, c’était ‘mais vous n’êtes pas trop jeune pour être maire ?’, confie Hugo Biolley. Je pense que la vraie crainte des gens était de savoir si j’étais capable d’assumer ce rôle… Depuis mon élection, plus personne ne me le demande puisque j’ai fait mes preuves.“ Selon lui, la discrimination liée à l’âge est proche de la discrimination liée au genre. “On se retrouve avec les mêmes schémas : idées reçues par rapport à la légitimité, manque de représentativité… C’est plus difficile de se faire une place, d’arriver à ce que les gens nous prennent au sérieux.“ Cela étant dit, Ophélie Escot préfère se concentrer sur celles et ceux qui l’ont soutenue. “Beaucoup de gens étaient contents de voir qu’une jeune comme moi pouvait s’intéresser à la vie politique, même si pour moi c’est plutôt un engagement citoyen. Bien sûr que j’ai eu des doutes, je me suis demandée si j’allais être assez forte pour tenir six ans, le temps du mandat. Mais je me suis lancée ! Ce qui est nécessaire, quand on veut changer les choses, c’est la motivation et la persévérance. Bien souvent, on a peur de se tromper, mais il faut se décomplexer là-dessus : des erreurs, on en fera. En un an, j’en ai déjà faites quelques-unes. L’essentiel est d’en tirer les bonnes leçons.“ À l’heure actuelle, seulement 19,8% des communes françaises sont dirigées par des femmes. Nous sommes encore loin du 50/50, mais des progrès ont été faits. Par exemple, la commune de Tilloy-lez-Marchiennes (Hauts-de-France) a désormais à sa tête Marie Cau, première femme transgenre élue maire en mai 2020. Elle a d’ailleurs exprimé récemment sa volonté d’être candidate à l’élection présidentielle de 2022. Les Petites Glo, que vous soyez dans votre lit, au fond du bus ou dans la cour de votre école, vous vous dites peut-être que vous aimeriez être à la place d’Ophélie, Marie, Hugo, Ava, CJ, Jordan ou Martha. Que vous ayez 12 ans ou 25, que vous viviez à Paris, Lyon, Marseille ou dans un petit village, rappelez-vous que vous en êtes capables et que si nous voulons voir grimper les pourcentages de femmes élues, nous devons commencer par nous serrer les coudes. Eh oui, car à la fin du livre Un fabuleux destin, quand la première présidente américaine accède au pouvoir, elle dit ceci : “Le moment décisif de ma vie fut le jour où j’ai rencontré mes meilleures amies par un bel après-midi de fin d’été. Sans ces trois-là, je ne serais pas la femme qui vous parle aujourd’hui.“ Les recommandations de ChloéÀ partir de janvier 2022, la pilule contraceptive sera gratuite et entièrement remboursée pour les femmes jusqu’à l’âge de 25 ans. C’est bien, mais c’est insuffisant. Depuis la rentrée, les enfants nés en 2010 sont harcelés à l’école et sur internet à travers le hashtag #anti2010. BORDEL, C’EST QUOI CE DÉLIRE ? Grandes sœurs, cousins, parents : soyons vigilant.e.s <3 Face aux talibans, les Afghanes refusent de se voiler et défendent leur culture et leurs tenues traditionnelles à travers le mouvement #DoNotTouchMyClothes. “Meilleur livre de l’année“ selon le New York Times, Rends-moi fière est le premier roman de Nicole Dennis-Benn. Il raconte l’histoire de trois femmes noires jamaïcaines : Dolores et sa fille aînée Margot qui font tout pour subvenir aux besoins de la plus jeune de la famille, Thandi, élève brillante dont elles rêvent qu’elle fasse des études supérieures. Il y est question de racisme, d’homophobie, de prostitution… C’est magnifique. (Et pour information, en 2012, l’autrice est devenue la première femme à épouser une autre femme en Jamaïque !) Les Petites Glo, connaissez-vous Vivian Maier, l’une des plus grandes photographes du XXème siècle ? Le musée du Luxembourg, à Paris, lui consacre une très belle exposition. Si vous le pouvez, allez-y ! Et côté théâtre, je vous recommande vivement The Normal heart, la pièce bouleversante de Larry Kramer, fondateur en 1987 de l’association militante Act Up contre le sida. Elle est autobiographique et se déroule à New York, entre 1981 et 1984, quand l’épidémie apparaît dans la communauté homosexuelle. La pièce se joue au théâtre du Rond-Point, à Paris, jusqu’au 3 octobre. Et pour finir, tout le monde devrait regarder cette vidéo pour comprendre que les photos qui remplissent nos magazines et nous complexent sont retouchées pendant des heures… par @period.studio Les dernières newsletters Gloria MediaFake it until you make it ?, Les Glorieuses, 15 septembre 2021 Avoir 20 ans en Afghanistan, Les Petites Glo, 7 septembre 2021 La grande victoire des femmes de chambre qui ont lutté contre l’industrie hôtelière, Impact, 30 août 2021 Elles ont un plan, Economie, 26 juillet 2021 |
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