Cette newsletter vous a été transférée ? Et vous aimez tellement que vous souhaitez vous inscrire ? C’est ici ! 20 mars 2023 « Puisqu’il s’agit de douleur, il s’agit de ressenti » – vos perspectives sur le congé menstruel Par Megan Clement Vous n’avez qu’une minute pour lire cette newsletter ? En voici le contenu en très – très – bref :
Speak English ? La newsletter est aussi disponible en anglais : Il y a deux semaines, après que l’Espagne soit devenue le premier pays d’Europe à instaurer un congé menstruel, j’ai demandé aux abonné·es d’Impact ce qu’elles en pensaient. Au moment d’écrire ma tribune, je savais que le congé menstruel était une mesure controversée, et que les féministes avaient tout un éventail d’opinions sur son impact sur l’avancée des droits des femmes et des dissident·es du genre. Mais je ne m’attendais pas à lire une telle richesse dans les réponses de nos lectrices. Vous êtes si nombreuses à avoir pris le temps de réfléchir à mes questions en profondeur, à partager vos espoirs et vos inquiétudes, vos idées et vos expériences personnelles autour du travail et des règles. Je ne pouvais pas laisser ces missives prendre de la poussière toutes seules dans ma boîte mail. Du coup, cette semaine, à la place de notre interview habituelle, ce sont les abonné·es qui s’approprient la newsletter. Voici quelques extraits des réponses* que j’ai reçues, joliment illustrées par l’artiste Lucymacaroni. Mes questions Merci à toutes celles et ceux qui ont écrit et qui lisent régulièrement la newsletter Impact. Et si vous avez quoi que ce soit à partager à propos de ce que vous lisez dans nos newsletters, n’hésitez jamais à répondre à ce mail. * Les réponses ont été éditées par souci de brièveté et de clarté.
Je partage ce « débat » à l’intérieur de moi-même. Puisqu’il s’agit de douleur, il s’agit de ressenti. J’en viens à mon cas perso, puisqu’il s’agit de ressenti je ne peux juger que le mien. J’ai un stérilet aux hormones. Je n’aime pas ça, mais c’est tout de même hyper pratique : je n’ai plus mes règles et plus de douleur, je sens mon cycle uniquement parce que je me connais et que je sais lire l’évolution de mes humeurs. Pour moi, Alors faut-il instaurer un congé spécifique, je ne sais pas. Déjà qu’obtenir un rendez-vous chez le généraliste sous 48h relève de l’exploit, si celui-ci est conditionné à un avis médical ça me paraît une fausse bonne solution. Faut-il que cette douleur soit connue, reconnue, partagée et non mise sous silence ? Un grand oui. Que les managers en entreprise y soient formés et sensibilisés?
Je pense que le congé menstruel est une avancée pour le droit des femmes. Beaucoup de femmes ont des règles très douloureuses et seraient ravies d’y avoir recours. Malheureusement, mon entreprise ne Illustration par Lucymacaroni.
Je ne le prendrai pas pour toutes les raisons évoquées dans votre newsletter : trop intrusif, possibles discriminations. De plus, je ne vois pas pourquoi les douleurs menstruelles devraient faire l’objet d’un congé maladie qui, parce qu’il nomme la raison pour laquelle on est en congé, le met un peu à part des autres congés. Les douleurs menstruelles n’ont pas à être ignorées mais elles Peut-être est-ce plutôt au niveau de la médecine que ces douleurs devraient être prises en considération en étant plus à l’écoute et en sensibilisant plus. Par exemple, combien de temps s’est-il écoulé avant qu’une campagne de pub informe sur l’endométriose ? Et je suis sûre que tout le monde n’est pas encore au fait de cette maladie à cause des tabous autour des règles. On peut aussi souffrir sans avoir d’endométriose. Et on peut souffrir et se dire, à tort, que c’est normal.
Je suis actuellement consultante dans la prévention des violences sexuelles et de genre. Jusqu’en juin dernier, j’étais la directrice santé et sécurité d’une entreprise. On n’a jamais travaillé sur le congé menstruel : c’était une erreur. Les difficultés de travailler pendant ses règles ont été ignorées pendant longtemps, tout comme le sexisme du quotidien. Si un congé menstruel avait existé, personnellement, je ne l’aurais pas pris, n’étant pas concernée par des Cependant, il y a la possibilité que cela renforce les discriminations liées au genre. Les femmes oseront-elles prendre ce congé si elles risquent d’être vues comme moins performantes que les hommes ? Ces femmes seront-elles désavantagées par rapport aux femmes qui travaillent à mi-temps ? Illustration par Lucymacaroni.
Ces congés devraient être rendus possibles en France. Les troubles liés aux règles, quels qu’ils soient, sont souvent synonymes de lutte pour être reconnu·es et encore plus pour recevoir un traitement adapté ; la réponse universelle est trop souvent la pilule ! À croire que les médecins en oublient que c’est un moyen de contraception hormonal aux nombreux effets secondaires. Les raisons d’endurer des règles J’insiste aussi sur la mention « personnes menstruées » parce que j’imagine que si un jour une loi passait à ce sujet, Les personnes menstruées devraient pouvoir agir comme iels le souhaitent sans condition (justificatif, durée, vie privée rendue publique…) ni jugement (je n’ai pas évoqué les cycles interminables qui s’étendent sur plusieurs semaines), et il devrait en être de même pour tout le monde. Mais là, on part dans un monde qui a plus à changer que la question des congés menstruels.
Je pense que toutes les entreprises ne sont pas encore prêtes à accueillir ce genre de changement, comme le peut le laisser entendre cette étude Ifop d’octobre 2022 :
Malheureusement, il y a encore un risque de stigmatisation, mais garder le sujet tabou et sous silence n’aidera pas à trouver des solutions. 53 % des salariées ont des règles douloureuses. Les règles douloureuses sont anormales, Toutes les douleurs ne sont pas liées aux maladies chroniques comme l’endométriose ou le SOPK (syndrome des ovaires polykystiques), même si ces maladies concernent une femme sur 10. Mais si on ne donne pas les clés aux femmes pour se soigner durablement et qu’on leur donne juste des anti-douleurs ou en les mettant sous pilule sans chercher à comprendre la source du problème, c’est juste mettre la poussière sous le tapis. 35 % des femmes déclarent que leurs douleurs menstruelles impactent négativement leur travail. Une étude réalisée en 2017 aux Pays Bas révélait que c’était 80 % de perte de productivité pour les femmes en périodes menstruelles et 9 jours de productivité en moins, chaque année, par femme. Pourtant, avec une meilleure prise en charge des douleurs, on peut réduire ces chiffres, mais également en formant les femmes à leurs fonctionnements cycliques et aux bonnes pratiques pour moins subir. Illustration par Lucymacaroni.
Je suis doctorante. J’ai aussi été employée pour des charges de cours et en tant qu’auxiliaire d’enseignement. J’ai été « chargée » de diverses tâches à la dernière minute et pour lesquelles je n’ai pas été rémunérée, cela faisant « partie du rôle de doctorant·e » que d’être disponible (gratuitement) à tout instant. Comment prendre un congé dans ce cas-là ? Comment résister à la pression sociale et psychologique Prendre un congé durant les vacances d’été est, pour moi (et pour mes collègues femmes), déjà une épreuve : il faut surmonter la culpabilité de ne pas être en train de rédiger sa thèse et donc d’être perçue comme paresseuse, impostrice, profiteuse, mais aussi l’angoisse de ne pas pouvoir répondre aux e-mails et donc la peur de manquer une opportunité. En théorie, j’aimerais prendre un vrai congé menstruel car je souffre d’endométriose qui me cloue au lit pendant trois jours En pratique, dans un milieu où l’on souffre déjà de sexisme, je ne vois pas comment aborder le sujet avec des hommes qui pensent déjà que notre avis et nos compétences valent moins, que l’on a toujours un problème et, surtout, où des congés maternité Comment éviter, dans un milieu machiste et masculiniste, que cela ne devienne un moyen de dénigrer encore plus les femmes et les personnes qui ont un cycle menstruel douloureux et handicapant ? D’exercer une pression sociale mais aussi psychologique supplémentaire qui abaisserait le plafond de verre d’un étage ? Donc, pour l’instant, je m’arrange avec moi-même, je récupère le retard accumulé durant les week-ends, les soirées et les vacances, je m’entoure de professionnelles de santé qui m’accompagnent dans la
Le congé menstruel risque d’augmenter les stéréotypes sur les femmes dans le monde du travail. Mais pour certaines femmes, dont je fais partie, les règles sont vraiment douloureuses. Cela ne dure jamais pendant toutes mes règles mais il y a toujours un jour ou deux pendant lesquels je me sens affaiblie et fatiguée. Je n’ai pas besoin d’aller chez le docteur – je ne suis pas malade – mais je ne Avec la crise du Covid, on sait que la plupart d’entre nous peuvent télétravailler. Cela pourrait être une alternative pour les femmes qui ne veulent pas sortir pendant leurs règles. Pour celles qui ne peuvent pas travailler à la maison, je pense que le congé menstruel devrait être envisagé. Mais cela doit être une vraie alternative, pas un moyen de mettre la pression sur les femmes. Encore une fois, on entend les non-féministes et leurs préconceptions sur les femmes. Ces flemmardes ! Comme si c’était sympa de se tordre de douleur au fond de son lit. Donc oui, je suis pour le congé menstruel ! Mais il faut qu’il soit réfléchi, et les femmes doivent vraiment Le journalisme féministe vous intéresse ?Je suis fière d’être une membre de The Gender Beat, un collectif de journalistes qui travaillent à rendre visible le journalisme féministe dans le monde. Vous pouvez trouver plus d’informations dans cet article de la World Association of News Publishers. Demain, nous organiserons un atelier en ligne (en anglais) sur comment convaincre les rédactions d’adopter un journalisme féministe avec les consultant·es média Luba Kassova et Richard Addy. Première fois par ici ? Impact est une newsletter hebdomadaire de journalisme féministe, dédiée aux droits des femmes et des minorités de genre dans le monde entier. Chaque mois, nous publions un bulletin d’actualité sur les droits des femmes et des personnes LGBTQIA+, un entretien, un reportage et un essai de la rédactrice en chef. Ceci est la version française de la newsletter ; vous pouvez lire la version anglaise ici. Megan Clement est la rédactrice-en-chef de la newsletter Impact. Anna Pujol-Mazzini est la traductrice. Agustina Ordoqui prépare le bulletin mensuel et rédige les posts d’actualité sur les réseaux sociaux. La newsletter est financée par New Venture Fund et produite par Gloria Media, basée à Paris. Gloria Media est dirigée par sa fondatrice, Rebecca Amsellem. Gloria Media remercie ses partenaires pour leur Abonnez-vous à nos autres newsletters : Les Glorieuses / Économie / Les Petites Glo |
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