« Je pense que la révolution nous a changées. »
Conversation avec la photographe Eythar Gubara autour de la Révolution au Soudan, sa pratique de la photographie et le female gaze.
par Rebecca Amsellem (pour me suivre sur Insta, c’est là et sur Twitter, c’est là)
Aujourd’hui, je converse avec une photographe incroyable, Eythar Gubara. Eythar Gubara est née au Soudan, à Khartoum plus précisément et a appris la photographie en autodidacte vers l’âge de 20 ans. Puis, elle s’est formée l’Institut Goethe pour en apprendre davantage sur les techniques. Dès le début, elle a utilisé la photographie comme moyen de montrer les combats pour les droits humains au Soudan. Elle a reçu le Prix de la photo Madame Figaro – Arles 2021 pour l’œuvre intitulée « Kandakas can’t be stoped » – les Reines ne peuvent pas être arrêtées. Cette conversation s’est déroulée dans le cadre du partenariat avec le Musée de la Croix Rouge au FIFDH à Genève. La traduction en français a été réalisée par Stephanie Williamson. L’entretien dans sa version originale, en anglais, est à retrouver en fin de newsletter. Pour la clarté du propos, la conversation a été éditée.
Rebecca Amsellem – Utilisez-vous la photographie comme un moyen pour aider les gens à ne pas oublier certaines choses ?
Eythar Gubara – Je fais de la photographie parce que je veux que les gens changent leurs façons de penser à certaines choses. Prenons l’exemple de l’exposition Thawra ! Révolution ! à Arles. Ce projet photographique porte sur les femmes vivant dans le système patriarcal. Les cinq photos s’intitulent Kandakas Can’t Be Stopped. Au Soudan, la situation des femmes avant la révolution était mauvaise. Je parle des mariages précoces, des viols, etc. Parmi ces photos, il y en avait une qui s’appelait Ghost. C’est une
photo d’une femme debout près d’une fenêtre, avec un drap blanc autour d’elle et d’un homme qui dort dans la chambre. Le lit est en désordre. Elle regarde par la fenêtre en pensant à sa vie. Elle rêve d’une belle vie. Mais la réalité est quelque chose de complètement différent. Avec ces photos, je voulais ouvrir les yeux des gens de ma communauté pour qu’ils puissent voir les femmes comme des belles personnes, des êtres humains. Mon idée est d’abord de prendre la photo pour ne pas oublier, puis de faire changer d’avis. Je parle de cela parce que j’en ai beaucoup souffert, et j’ai besoin de changement. Je connais beaucoup de femmes au Soudan qui ont, elles aussi, besoin de changement.
Rebecca Amsellem
– Ce que j’ai trouvé très intéressant, c’est que les autres photos de la même exposition à Arles, qui s’appelait Thawra ! Revolution ! Soudan, histoire d’un soulèvement – ou bien d’autres photos de révolutions – ont tendance à montrer les gens soit comme des héros soit comme des victimes. Ce que j’ai aimé dans votre travail, c’est qu’il montre des activistes qui agissent clairement comme des héros dans le cadre de l’histoire qui nous sera enseignée dans peut-être quelques années, si ce n’est maintenant. Mais nous les voyons aussi dans leurs rôles quotidiens en tant que personnes réelles. Je me demandais, pensez-vous que les femmes que vous avez photographiées ont maintenant la reconnaissance
qu’elles auraient dû avoir depuis le début, grâce à vos photographies ou à votre travail ?
Eythar Gubara – Je pense qu’au Soudan, les femmes, en général, ont plus de pouvoir maintenant. Je suis très fière d’avoir participé à ce changement mais ce n’est pas lié à mes photographies. C’est lié au fait que j’étais là et que j’ai vu le changement en soi. Maintenant, les femmes peuvent dire non. Si quelqu’un harcèle une femme, elle a le pouvoir de dire non ou de se défendre. Auparavant, elles étaient timides parce que tout le monde disait, c’est de ta faute, c’est la façon dont tu t’habilles, c’est la façon dont tu marches, tout ce que vous
voulez. Mais maintenant, elles peuvent se défendre. Je pense que la révolution nous a changées.
Rebecca Amsellem – Vous êtes à la fois une activiste dans cette révolution et en même temps vous êtes là pour la documenter afin que le reste du monde puisse réellement voir ce qui se passe. Nous parlons de beaucoup de choses dans les pays occidentaux et la révolution au Soudan n’en fait pas forcément partie.
Eythar Gubara – Oui, mais je n’ai pas pu tout documenter parce qu’à un moment donné, il faut fuir pour sauver sa vie plutôt que de rester filmer ou prendre une photo.
Rebecca
Amsellem – Dans son essai intitulé On Photography, Susan Sontag écrit : « Prendre un cliché, c’est participer à la vulnérabilité, à la nature instable et mortelle d’un être ou d’une chose. C’est précisément en découpant cet instant et en le fixant que toutes les photographies témoignent de l’œuvre de dissolution incessante du temps. » On a l’impression que vos photographies font en fait le contraire ; elles créent de la vie, de la narration, une perspective à laquelle nous ne sommes pas habitués. Comment avez-vous choisi cette perspective si particulière ?
Eythar Gubara – J’ai vécu toute ma vie au Soudan, et
j’ai vécu ce que vous voyez dans les photos. C’est pourquoi j’ai voulu le montrer dans mes photographies. Je ne choisis pas simplement des modèles. Non, je choisis des personnes qui sont vraiment touchées par cette chose que je veux capturer. Elles le vivent vraiment. Pour prendre une photo, il faut y mettre ses propres sentiments. Chaque fois que je prends des photos, je parle aux personnes. Je ne donne pas les noms des modèles parce que ce ne sont pas des modèles pour moi. Ce sont simplement des héroïnes. Nous avons une longue conversation pour qu’elles sentent qu’elles peuvent s’ouvrir à moi, et qu’elles puissent ressentir l’émotion que je veux exprimer à travers les photos.
Rebecca Amsellem – Cette prochaine
question m’a été soufflée par Pascal Hufchmid, directeur du musée de la Croix-Rouge. Comment jugez-vous l’impact de vos photos sur votre communauté ? Comment jugez-vous l’impact de vos photos ailleurs, ici à Genève par exemple ?
Eythar Gubara – J’ai exposé la première photo, Ghost, au Goethe-Institut de Khartoum en 2016. Pour être honnête, beaucoup de gens disaient : « C’est quoi ça ? Comment pouvez-vous montrer une femme dans une chambre à coucher ? » Les commentaires que j’ai reçus des gens étaient vraiment mauvais. Je n’étais pas en colère. J’étais déçue. J’ai arrêté de prendre des photos pendant trois
mois après cela. Mais toute personne ayant réussi à quelque chose passe par là. Si on tombe du premier coup, on ne se relèvera jamais. Alors je me suis dit, s’ils me rejettent ou rejettent la photo, cela ne veut pas dire que je ne suis pas assez douée ou que mon travail n’est pas bon. Cela signifie que je dois persévérer. Ensuite, j’ai continué le même projet, qui est celui que vous avez vu à Arles, et je l’ai présenté au Soudan. À ce moment-là, les mêmes personnes étaient vraiment très fières.
(c) Miguel Bueno pour le FIFDH
Rebecca Amsellem – Vous êtes à la fois artiste et activiste. Voyez-vous ces rôles comme deux choses à part ou sont-ils inextricables ?
Eythar Gubara – Je pense que les deux se complètent. Mais si je ne pouvais garder qu’une des deux, je me vois plus comme activiste qu’artiste.
Rebecca Amsellem – Nous parlons de plus en plus du regard féminin pour décrire la façon dont les femmes regardent et imaginent prétendument les choses. Je dis « prétendument » car cela insinue que le regard féminin soit alors lié à quelque chose que les femmes ont dans leur ADN
– ce qui n’est évidemment pas le cas. Que pensez-vous de cette question ?
Eythar Gubara – Cela me met en colère parce que ranger les femmes dans des cases comme celle-ci suggère qu’elles ne peuvent faire que ça. Ce n’est pas vrai. Nous pouvons faire tout ce que nous voulons. Cela me fait penser à mon nouveau projet. Je l’ai réalisé l’année dernière à Hambourg, et il s’appelle Mon Crime est le Tien. Il porte sur la communauté LGBTQI+ au Soudan et au Moyen-Orient et sur ce à quoi nous sommes confronté.e.s. J’ai mené ce projet parce qu’au Soudan, avant la révolution, nous avions une loi qui criminalisait l’homosexualité. La loi stipulait que si vous vous
faisiez attraper une première fois, vous pouviez aller en prison pendant trois à cinq ans, puis recevoir 100 coups de fouet. La deuxième fois, la même chose. Et la troisième fois, vous seriez exécuté·e. Comme je travaille en tant que militante de la communauté LGBTQIA+, je me suis rendue à une conférence là-bas et, par conséquent, je suis allée en prison. J’ai exposé des autoportraits que j’ai pris en prison. Je veux vraiment que la société nous considère comme des êtres humains, car nous sommes des êtres humains, comme tout le monde. C’est pourquoi j’ai appelé le projet Mon crime est le Tien. Après la révolution, ils ont supprimé la peine de mort. Mais, malgré tout, des gens sont tués en raison de leur sexualité. Par
exemple, en 2020, ils ont tué deux hommes gays parce qu’ils voulaient se marier, entourés de quelques amis. Le reste du quartier l’a appris, est venu et les a battus. Les deux sont morts. Personne n’a rien fait. Il n’y a pas de peine de mort, mais ils risquent quand même la mort.
Rebecca Amsellem – Êtes-vous récemment tombée sur quelque chose qui vous a ébloui sur le plan artistique ?
Eythar Gubara – Zanele Muholi. Elle travaille sur l’autoportrait. Elle parle de l’identité, de
la sexualité, de tout avec des autoportraits. Je ne sais pas. Elle est tout simplement fascinante. La façon dont elle se présente sur les photos montre qu’elle ne parle pas seulement d’elle-même, mais de toutes les femmes lesbiennes noires, et puis comment elle est vraiment fière. C’est ce que j’aime vraiment dans son travail. Elle est fière d’elle-même en tant que femme.
Rebecca Amsellem – La question suivante consiste à imaginer une société féministe comme une sorte d’utopie. L’idée est de nous projeter. En gros, la révolution féministe est accomplie partout dans le monde. Nous vivons dans une société parfaite. La révolution de l’entre-deux est également terminée.
C’est vraiment parfait. C’est une société féministe, antiraciste, inclusive, postcapitaliste. C’est un rêve. Comment décririez-vous cette société ? Pas la société entière, mais un petit détail qui fait partie de cette société et qui n’existe pas dans notre société actuelle.
Eythar Gubara – En tant que Soudanaise, je veux retourner un jour au Soudan et vivre en paix avec mon identité, avec tout. Je veux que les gens puissent accepter tout le monde. C’est la société dont je rêve.
(c) Miguel Bueno pour le FIFDH
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Conversation en langue originale (anglais)
Rebecca Amsellem Do you use photography so that people would not forget things?
Eythar Gubara Actually, I’m using photography because I want people to change their thoughts about specific things. Let’s take the exhibition Thawra, Revolution in Arles, as an exemple. This photo project is about women living in the patriarchal system. The five pictures were called Kandakas Can’t Be Stopped. In Sudan, the condition of women was bad before the revolution. I am talking about early marriages, rapes etc. Among those pictures, one was called Ghost. It’s a picture of a woman standing by a window, putting a white sheet over her and a guy sleeping in the bedroom. The bed
is just chaos. And then she’s just staring in the window as, like, thinking about her life. She was dreaming about her life being so beautiful. But then the reality was something completely different. With these photos, I wanted to open the eyes of the people in my society so they could see women as beautiful human beings. My idea is first take the picture so you cannot forget it, and then you change your mind. I was also speaking about this because I suffered a lot from this, and I need change. I know a lot of women in Sudan, they also need change.
Rebecca Amsellem What I thought was very interesting is that of the other photographs in the very same exhibition in Arles that was called Thawra! Revolution in Sudan: The History of An Uprising or other photographs about revolutions tend to show people as either heroes or
victims. What I loved about your work is it showed activists who clearly act as heroes in the framework of the history that we’re going to be taught in maybe a few years, if not now. But we see them in their everyday roles also as real people. I was wondering, do you feel that the women that you took a picture of now have the recognition they should have had all along, thanks to your photographs or to your work?
Eythar Gubara I think in Sudan, women, in general, are more powerful now. I’m so proud I was part of this change. It’s not related to my photographs. It’s about that I was there and I saw the change itself. Now, women can say no. If someone harasses a woman, she has the power to say no or she can fight back. In the past, she was just shy because everyone would say, it’s your fault, it’s the way that you dress, it’s
the way that you walk, it’s whatever. But now they can stand for themselves. I think the revolution changed us.
Rebecca Amsellem You’re both an activist as we feel that you’re part of this revolution and at the same time you are here to document it so that the rest of the world can actually see what happens. We talk about lots of things in Western countries and maybe the Sudanese one is not necessarily one of them.
Eythar Gubara Yes but I couldn’t document everything because at some point rather you run for your life or you stay and take a film and take a shot.
Rebecca Amsellem In Susan Sontag’s essay On Photography she says “to take a photograph is to participate in another person’s mortality, vulnerability, mutability. precisely by slicing out this moment and freezing it, all photographs testify to time’s relentless melt.” It feels that your photographs actually do the opposite, it creates life, narrative, a perspective we are not usually accustomed to. How did you choose this specific perspective ?
Eythar Gubara I lived my whole life in Sudan, and I lived what you see in the pictures. That’s why I wanted to show it in my photographs. I’m not just choosing models or anything. No, I’m choosing the people that are really affected by this thing. They are really living it. To take a photo, you have to put your own
feelings in this picture. Every time I take pictures, I speak to the people. I’m not naming them models because they are not models for me. They are just heroes. Then we have a long conversation, so she can feel like she can open up for me, and then she can feel the thing that I wanted to get in the photos.
Rebecca Amsellem This next question was actually whispered to me by Pascal Hufchmidt, director of the Red Cross Museum. How do you judge the impact of your images on your community? How do you judge the impact of your images elsewhere, here in Geneva for example?
Eythar Gubara I first showed the first picture, Ghost, it was in Goethe-Institute in Khartoum in 2016. To be honest, a lot of people were like, « What is this? How can you show a woman
in the bedroom? » The comments that I got from the people were really bad. I wasn’t angry. I was disappointed. I stopped taking pictures for three months after that. Every successful person in their beginnings was beaten up. If you just fall the first time, you’re never going to be up again. So then I said to myself, if they reject me or reject the picture, that doesn’t mean that I’m not good enough or my work it’s not good. That means I have to keep doing it. Then I continued the same project, which is the one that you saw in Arles, and I showed it in Sudan. At that point, the very same people were actually so proud.
Rebecca Amsellem You are both an artist and an activist. Do you see the two of them differently or are they inextricable ?
Eythar Gubara I
think two of them have to complete each other. But if I can keep only one thing, I see myself as an activist more than an artist.
Rebecca Amsellem We talk more and more about a female gaze to describe the way women are allegedly looking at things, and picturing them. I say “allegedly” because it seems that the female gaze is then related to something women have in their DNA’s – which they obviously don’t. What do you think about this matter ?
Eythar Gubara It makes you angry and it makes me angry because when you put a woman in a box like she can only do this. That’s not true. We can do whatever we want. It makes me think of my new project. I did it last year in Hamburg, and it’s called My Crime is Yours. It’s about LGBTQI+ community
in Sudan and Middle East and what we are facing. I did this project because in Sudan, before the revolution, we had a law criminalizing homosexuality. The law is if you get caught the first time, you can go to prison for 3-5 years, and then you can take 100 lashes. The second time, the same. And the third time, you will be executed. Because I work as an activist in the LGBTQI+ community, I went to this conference there and as a result I went to jail. I put some self-portraits I took in jail. I really want my society to see us as human beings because we are just human beings, just like everyone. That’s why I call it My Crime is Yours. After the revolution, they took out the death penalty. But still, people get killed because of their sexuality. For example, in 2020, they killed two gay men because they wanted to get married, among a few friends. The rest of the neighborhood heard
about it, came and beat them. Both of them died. No one did anything. There is no death penalty, but still they face death.
Rebecca Amsellem Have you recently come across something that blew your mind artistically ?
Eythar Gubara Zanele Muhol. She’s working for self-portraits. She’s speaking about identity, sexuality, and everything in self-portrait. I don’t know. She’s just fascinating. The way that she’s presenting herself in the photos, it’s not just she’s speaking about herself and she’s speaking about all of the, if I can say, Black lesbian woman, and then how she is really proud. That’s what I really like about her work. She’s really proud of herself as a woman.
Rebecca Amsellem The
next question is about imagining a feminist society like some kind of a utopia. The idea is to project ourselves. Basically, the feminist revolution is done everywhere in the world. We are living in the perfect society. The in-between revolution is also over. It’s really perfect. It’s feminist, anti-racist, inclusive, post-capitalist society. It is a dream. How would you describe the society? Not the whole society, but some tiny detail that is part of the society that did not exist in our society today.
Eythar Gubara As a Sudanese woman, I want to go back one day to Sudan and live in peace with my identity, with everything. Just people can accept everyone. This is the society that I’m dreaming about.
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