Cette newsletter vous a été transférée ? Et vous aimez tellement que vous souhaitez vous inscrire ? C’est ici ! Mercredi 21 juin 2023 Information partenaire Elle exigea d’être prise au sérieux – l’histoire de Faith Ringgold *** Mille mercis pour vos achats, cela compte BEAUCOUP pour nous /// Vous souhaitez nous soutenir ? C’est encore possible en commandant quelque chose de la boutique ici. Merci beaucoup <3 *** « 50 % ». Lorsque sa fille, Michele, lui répond, Faith Ringgold n’en revient pas : « 50 % ? » L’artiste afro-américaine lui demandait alors quel pourcentage de femmes artistes le groupe d’artistes engagée·s Women Students and Artists for Black Art Liberation (WSABAL) devrait exiger pour une exposition d’art. 92 ans aujourd’hui, Faith Ringgold est née à Harlem, à New York dans une famille de trois enfants. Ne pouvant jouer comme les autres enfants à cause d’un asthme handicapant, sa mère l’a introduite aux arts visuels très jeune. Son activité artistique s’est professionnalisée après son diplôme d’université. Elle garde un emploi de professeur d’art jusqu’à ses 43 ans, après quoi elle se consacre entièrement à son art. Lorsque Faith Ringgold interroge sa fille, nous sommes en 1970 et l’exposition en question s’appelle la Biennale de Venise « libérée ». Elle a pour ambition d’être une protestation contre la guerre au Cambodge et, de manière plus globale, contre les politiques américaines racistes et sexistes. « Je n’avais encore jamais entendu personne suggérer autant d’égalité pour les femmes », écrit l’artiste dans ses Mémoires (we flew over the bridge, the memoirs of Faith Ringgold, Duke University Press, 2005) . « Peut-être qu’elle était sous pression, peut-être qu’elle ne m’avait tout simplement pas bien entendu, ou que je ne l’avais pas bien entendue ». Elle lui repose sa question « Quel pourcentage de femmes artistes penses-tu que nous devrions exiger pour l’exposition ? ». Cette fois-ci Faith Ringgold s’est concentrée pour écouter attentivement la réponse de sa fille. « Michele leva les yeux et, élevant la voix, me regarda droit dans les yeux. Elle répétait : “50 % de femmes, et 50 % de ces femmes doivent être noires et 25 % doivent être étudiantes”. » Woman on a Bridge #1 of 5: Tar Beach, 1988, Huile, toile, tissu imprimé, encre, fil, 189.5 x 174 cm Ce dont l’artiste, aujourd’hui reconnue par toutes et tous, s’est rendue compte ce jour-là, c’est que la génération de sa fille ne s’attarderait pas sur autre chose que l’égalité réelle, effective. « Cette année-là, je suis devenue féministe parce que je voulais aider mes filles, d’autres femmes et moi-même à aspirer à quelque chose de plus qu’une place derrière un homme bon ». Faith Ringgold s’était pourtant habituée aux ersatz d’égalité, aux galeries qui la boudaient, aux acheteurs qui semblaient franchement offensés par ses œuvres, aux absences d’opportunités alors même qu’elle prenait son art avec tout le sérieux approprié. « J’ai décidé de faire savoir que j’étais une artiste exigeant d’être prise au sérieux », écrit-elle à propos du début des années 60, moment où elle décida de présenter ses œuvres auprès des professionnels du monde de l’art. L’art de Faith Ringgold est multiple, elle peint, elle coud, elle écrit pour les enfants, elle écrit pour les adultes. Si une phrase peut résumer son œuvre, c’est celle-ci : « Je voulais que ma peinture exprime ce moment que je savais appartenir à l’histoire. Je voulais donner mon point de vue de femme sur cette période. » Elle parle de la lutte pour les droits civiques aux États-Unis, elle parle des discours de Malcom X, elle parle des écrits de James Baldwin sur les relations entre les Noirs et les Blancs. Car l’art de Faith Ringgold est politique. Son objet est politique. Sa technique est politique. Dans une série intitulée The French Collection (qu’on peut voir actuellement au musée Picasso dans une rétrospective qui lui est consacrée jusqu’au 2 juillet), elle narre l’histoire de Willia Marie Simone, son avatar. Willia Marie Simone est un personnage fictif, une artiste qui a vécu à Paris dans les années 20. Selon ses propres mots, Willia Marie Simone est « une femme de courage, originale, créative ». Une femme « qui a pu faire des choses qu’aucune femme artiste afro-américaine n’a pu faire à Paris ou aux États-Unis ». Cette série met en scène l’histoire de Willia Marie Simone donc, jeune fille de 16 ans qui s’est rendue à Paris pour devenir une artiste. À Paris, elle s’est entourée de Gertrude Stein et sa compagne Alice B. Toklas, de Picasso, d’Hemingway, de James Baldwin et Zora Neale Hurston. La série montre également Willia Marie Simone à la fin de sa vie. Elle est alors veuve et propriétaire d’un café. On la voit échanger avec d’autres femmes noires. Le sujet de la discussion apparaît également sur l’œuvre : il s’agit de la contribution des femmes noires aux arts et à la politique. Il n’y a pas que l’objet de son art qui soit politique. Sa technique l’est également. À l’occasion de sa seconde exposition personnelle, qui s’est déroulée à New York à la galerie d’art Spectrum en 1970, elle expose son nouveau style « lumière noire » (black light). Cette technique lui offre la possibilité de célébrer les beautés noires. Elle comprend l’utilisation d’une palette très variée de couleurs sombres, riches, sublimes. « Je voulais m’engager désormais dans la “lumière noire”, dans des nuances chromatiques subtiles et dans des compositions basées sur mon intérêt nouveau pour les rythmes et les motifs africains. » Comme elle le dit elle-même, cette exposition, America Black, « était l’expression de notre appréciation nouvelle du fait d’être noir·e – nous n’avions jamais su jusqu’à présent que nous pouvions aimer être noir ». Faith Ringgold ne réalise pas d’œuvres qui ne racontent pas son histoire, elle met un peu – souvent beaucoup – d’elle dans chacune d’entre elles. À propos de celles-ci, elle a récemment dit, « ce sont des expressions de moi en tant qu’artiste. Et j’aime qui je suis, je n’ai aucune raison de changer cela ». Faith Ringgold, American People Series #20: Die, 1967. Huile sur toile, deux panneaux, 182,9 x 365,8 cm. The Museum of Modern Art, New York, Purchase; and gift of The Modern Women’s Fund, Ronnie F. Heyman, Glenn and Eva Dubin, Michael S. Ovitz, Daniel and Brett Sundheim, and Gary and Karen Winnick. © Faith Ringgold / ARS, NY and DACS, London, courtesy ACA Galleries, New York 2022. Digital Image © The Museum of Modern Art/Licensed by SCALA / Art Resource, NY. Cette newsletter a été écrite grâce aux mémoires de Faith Ringgold, we flew over the bridge, the memoirs of Faith Ringgold, Duke University Press, 2005. Son exposition personnelle peut être visitée au musée Picasso jusqu’au 2 juillet prochain. Elle est géniale. La majorité des citations viennent de cet ouvrage. Le livre n’étant disponible qu’en anglais, les citations ont été traduites en français par mes soins. La citation concernant la « lumière noire » était imprimée sur le mur de l’exposition, je ne sais pas d’où elle vient. La dernière citation est une réponse à une question posée par sa fille Michele Wallace parue dans un magazine, Interview, en 2020. « On est obligé de se lever car on n’a pas le choix. L’objectif est plus grand que nous ». L’engagement de Rana Hamra est sans faille. Elle est, comme elle le décrit si bien, le porte-voix de ces personnes… sans voix ». Rana Hamra a créé l’ONG Humanity Diaspo, organisation qui lutte pour combler le manque de disponibilité des produits de première nécessité pour les femmes et les filles. L’organisation lutte entre autres contre la précarité menstruelle chez les femmes en situation de vulnérabilité. Souvent, on imagine que l’engagement au service d’une cause est inné. Qu’il va de soi, qu’il est évident. Dans ce podcast co-produit par le Fonds L’Oréal pour les Femmes, notre partenaire, et Frictions, « Se révéler » raconte le parcours de celles et ceux qui chaque jour contribuent à changer la société. Vous pouvez écouter le nouvel épisode de ce podcast sur votre plateforme d’écoute habituelle.
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