15 septembre 2020 Welcome back Les Petites Glo pour une nouvelle saison de la newsletter où on apprend à changer le monde avec Chloé Thibaud. Changer le monde, oui. Même quand on n’a ni pouvoir ni argent. Si on vous a transféré cet email, vous pouvez vous inscrire – gratuitement – ici. Hier matin, Isis, 17 ans, est allée au lycée en crop top. Pas parce qu’il faisait 35 degrés, mais pour protester. Elle participait au mouvement #lundi14septembre, lancé sur les réseaux sociaux, qui invitait les jeunes filles à porter des vêtements courts pour lutter contre le sexisme ambiant dans leurs établissements (et déjà dénoncé depuis plusieurs jours grâce au hashtag #BalanceTonBahut). Avec son amie Alexandra, Isis a créé une pétition intitulée “Droit aux crop tops au lycée“ après que certaines de leurs camarades ont reçu des heures de colle parce que leurs tenues laissaient apercevoir quelques centimètres de leur ventre. “En apprenant ça, on est allées voir la proviseure adjointe du lycée, m’a-t-elle raconté. On lui a dit que ces sanctions participaient à la sexualisation constante du corps des femmes, qu’elles allaient contre notre liberté, qu’en faisant ça, le lycée nous apprenait qu’en fonction de comment on est habillées, ça peut justifier telle ou telle agression… Elle nous a répondu que le lycée était comme une petite ville et que oui, ce genre de tenues, ça pouvait exciter la gente masculine.“ Crédits : Dans Mon Tiroir sur Instagram De mon temps (#trentenaire), il était déjà interdit de montrer son nombril à l’école et jamais je n’avais remis cette règle en question. Pourquoi ? Parce que j’avais pleinement assimilé cette idée selon laquelle la façon dont je m’habillais pouvait potentiellement m’amener à être violée. Aujourd’hui, malgré toute mon envie de penser le contraire, il m’arrive encore de me dire que “je ferais mieux de porter des baskets car je vais rentrer tard et que si je dois courir, ce sera plus facile qu’en talons“. Aussi, alors que je ne supporte pas le port du soutien-gorge et que j’ai quasiment arrêté d’en mettre depuis le mois de mars, je n’assume pas toujours de sortir sans. Et ce qui est terrible, c’est que l’actualité me donne régulièrement raison d’hésiter. Cet été, le pôle “Genre, sexualités et santé sexuelle“ de l’Institut français d’opinion publique (IFOP) a publié une enquête très précieuse sur le “No Bra“ révélant que pour 20 % des Français, “le fait qu’une femme laisse apparaître ses tétons sous un haut devrait être, pour son agresseur, une circonstance atténuante en cas d’agression sexuelle“. Je ne me suis toujours pas remise de cette statistique. Mais ce qui me donne de la force et de l’espoir, c’est de constater que les collégiennes et lycéennes de 2020 sont bien plus alertes que moi à leur âge. “Le crop top n’a pas d’importance en soi, précise Isis, c’est seulement un symbole de l’idéologie qui se cache derrière : le règlement intérieur interdit aussi les débardeurs avec bretelles de soutien-gorge apparentes mais, d’un autre côté, si on ne met pas de soutif, les surveillants nous font des remarques sur nos tétons ! Avant d’entendre les anecdotes d’autres filles – qui se sont fait traiter de ‘putes’ ou de ‘traînées’ par des adultes du lycée – je ne m’étais jamais rendu compte que ce qui était acquis dans ma tête était très loin de l’être dans la société. Le pire, c’est que des filles ont été agressées au sein du lycée et que les arguments de l’administration ne marchent pas : l’une d’elles a la preuve en vidéo que ce jour-là elle était en jogging avec un long pull.“ Avant-hier, le dimanche 13 septembre, plusieurs activistes Femen ont manifesté seins nus au Musée d’Orsay, à Paris, parce qu’une étudiante du nom de Jeanne s’était vu refuser l’entrée par une agente chargée du contrôle des réservations, un agent de sécurité puis un responsable du musée… à cause de son décolleté. Dans une lettre ouverte, la jeune femme a écrit : “J’ai l’impression que tout le monde regarde mes seins, je ne suis plus que mes seins, je ne suis qu’une femme qu’ils sexualisent.“ Du lycée au musée, il n’y a qu’un pas. “Les gens du musée ont sûrement reçu cette éducation qu’on dénonce, m’explique Isis. Est-ce que notre éducation, aussi bien en allant voir des tableaux qu’en étant en cours, doit passer après notre style vestimentaire ?“ La #Libérationdu14 s’inscrit pleinement dans le mouvement de la Libération des seins, apparu en 1968, qui réclame le droit pour les femmes et les filles de se montrer seins nus en public, comme les hommes et les garçons. Depuis plus de cinquante ans, nous nous battons pour que chacune porte ce qu’elle veut et que personne n’ait le droit de lui faire du mal (moralement, physiquement) à cause de ses vêtements. Nous répandons partout ces messages – “Ma tenue n’est pas une invitation“, “Protégez vos filles ? Non, Éduquez vos garçons !“ – et je crois qu’ils commencent à être lus et entendus. Quand j’ai demandé à Isis ce que ses potes masculins pensaient de tout ça, elle n’a pas réfléchi une seconde avant de me répondre : “Ils soutiennent le mouvement ! Aucun d’eux ne se reconnaît dans ce que la proviseure décrit, ce ne sont pas des animaux incapables de se retenir devant les filles. Ils ont quasiment tous signé notre pétition, et ils ont fait des nœuds à leurs tee-shirts pour montrer qu’ils étaient à nos côtés.“ Sur TikTok, #lundi14septembre a été mentionné plus de 20 millions de fois au moment où j’écris cette newsletter et la pétition d’Isis et Alexandra a dépassé les 4000 signatures. Dès son lancement, des centaines d’élèves d’autres lycées y ont participé. “Les combats se passent comme ça pour notre génération, conclut Isis. J’attends de cette journée et de cette pétition que les adultes arrêtent de nous sous-estimer et de penser que parce qu’on a 17 ans, on ne peut pas révolutionner la société à notre image.“ Leur rêve ? Atteindre les 10.000 signatures et se faire entendre à l’échelle nationale. Allez les Petites Glo, on les aide à le réaliser ? Les recommandations de Chloé Si vous avez envie de passer à l’action (pour la planète, l’égalité, contre la violence, le racisme…) voici un livre qui va vraiment vous inspirer et vous guider : Toi aussi, tu peux changer le monde de Marion McGuinness. Il présente plus de 80 portraits de jeunes engagé·e·s qui ont entre 12 à 29 ans et vivent aux quatre coins de la planète, mais aussi des associations et des événements à suivre de près ! Il y a la zébrée, la forêt vierge, la niagara, la boucle d’or… de quoi je vous parle ? De vulves, bien sûr ! J’ai passé l’été à jouer au memory game Les Foufounes et je suis fan : n’ayez surtout pas peur de l’emmener en soirée. Il permet de discuter – entre copines ou avec des mecs – de la diversité de nos sexes, et donc de nous sentir mieux dans notre peau (et notre clito). La campagne #StopPrécaritéMenstruelle a porté ses fruits : en cette rentrée scolaire 2020, la région Île-de-France a équipé une douzaine de lycées de distributeurs de protections périodiques gratuites pour que toutes les jeunes filles puissent se protéger correctement pendant leurs règles. D’autres distributeurs doivent être installés dans les prochains mois. Qu’on ait 13, 23, 33 ans, nous faisons toutes face au harcèlement de rue. Et si la solution pour se sentir plus en sécurité, c’était une application ? The Sorority est enfin disponible dans toutes les villes de France et son installation est gratuite. Les Petites Glo, n’attendez pas pour la télécharger ! “C’est angoissant je trouve le futur, en vrai !“ Foncez au ciné pour voir le nouveau film de Sébastien Lifshitz, “Adolescentes“. C’est l’histoire d’Emma et Anaïs, deux amies que l’on suit de leurs 13 à leurs 18 ans et qui se construisent dans une société marquée par les attentats de Charlie Hebdo et du Bataclan. C’est bouleversant. |
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