Comment changer le monde quand on n’a ni pouvoir ni argent ? Bienvenue dans la Masterclass de la newsletter Les Petites Glo. Pendant sept semaines, Chloé Thibaud va vous expliquer – concrètement – comment passer de l’idée à l’action, de la société de rêve à la réalité (oui, oui), bref, comment devenir un.e activiste. Pour cela, elle sera accompagnée de femmes archi bad ass qui contribuent déjà, chacune à leur manière, à rendre la société plus juste. Alors, prêt.e.s à bouger ? Semaine 4 : Passer à l’action avec Shanley Clemot McLarenIl y a un an, pendant le premier confinement de 2020, je me souviens d’avoir lu plusieurs tweets signalant la création de comptes “fisha”. Sur Snapchat, ils se multipliaient, impunément. Organisés par département, les comptes fisha publiaient en masse des photos et vidéos à caractère sexuel de filles mineures. Les victimes souffraient en silence. Et puis, il y a eu cette jeune femme qui s’est emparé du problème et a décidé d’agir, d’abord en créant des threads et stories pour venir en aide aux victimes de revenge porn, puis en fondant Stop Fisha, une association féministe de lutte contre le cybersexisme et les cyberviolences sexistes et sexuelles. Elle s’appelle Shanley Clemot McLaren, elle a 22 ans, et je ne pouvais pas imaginer qu’elle soit absente de notre édition spéciale. “Avec Stop Fisha, on reçoit des dizaines de messages qui demandent comment on peut faire pour changer les choses, m’a-t-elle expliqué. Souvent, je remarque une chose chez les personnes qui nous écrivent : c’est la peur. La peur d’être seules, d’être jugées et de se retrouver sanctionnées à la fin. Mais quand tu t’engages, c’est ta lutte. C’est parce que tu as besoin de dire des choses, de les pointer du doigt. C’est censé te faire du bien et être bienveillant.” C’est donc en toute bienveillance qu’elle a accepté de partager ses conseils avec nous. Les Petites Glo, après trois semaines de Masterclass, vous avez désormais trouvé une cause qui vous tient à cœur, planifié votre action et lui avez même donné un nom et une identité visuelle. Il est temps de passer à l’action ! ⚡Unir ses forces Selon Shanley, le plus important est d’abord de trouver des allié.e.s. “Tu peux faire des actions individuelles, bien sûr, mais moi je préfère être avec d’autres personnes. Pas besoin d’être un groupe de vingt, mais c’est important de trouver quatre ou cinq personnes en qui tu as vraiment confiance, avec qui tu es d’accord et à l’aise.” Quand elle a découvert les comptes fisha, Shanley a essayé d’alerter en postant des premières stories auxquelles les gens ne répondaient pas trop ou face auxquelles ils semblaient plutôt découragés – on lui disait “c’est les réseaux sociaux, qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ?”. Mais elle n’a pas baissé les bras. “J’ai fait beaucoup de recherches, à la base je n’y connaissais rien mais, en deux jours, j’ai tout rassemblé et j’ai constitué un groupe de parole sur Twitter, avec des victimes et d’autres personnes qui voulaient aider.” En effet, lorsque vous menez à bien votre premier projet, le collectif peut s’avérer plus rassurant. Mais comment faire si vos potes n’ont pas vraiment envie de vous suivre ? “Moi, j’ai rencontré beaucoup de personnes pendant des actions justement, confie la militante, à des manifs, des assemblées générales, des réunions… Il y a tellement de façons de rencontrer de nouvelles personnes : par l’espace physique, évidemment, mais aussi le cyberespace – Twitter, Insta, Snap et même TikTok – qui permet d’échanger directement avec des personnes militantes.” ⚡Définir les rôles Avant le jour J, il est essentiel que chacun.e ait un rôle bien défini. “Cela permet de trouver ta place dans l’action, tout simplement, précise Shanley. Quand j’ai fait mon premier blocage féministe avec mes potes, on était une vingtaine à l’avoir organisé et on avait des teams : la team banderoles, la team chaînes, la team haut-parleur, la team nourriture-café… En se répartissant les tâches, tu te retrouves avec moins de charge mentale.” Cette répartition est judicieuse sur le volet réseaux sociaux également. “Avec Stop Fisha, on a créé un compte Insta pour pouvoir tout gérer ensemble, vu que je connaissais personne et qu’on venait de la France entière et même de Belgique, de Suisse ou d’Italie, il a fallu s’organiser. Cette page est devenue comme notre local.” ⚡Faire appel aux médias Une action réussie est en grande partie une action visible. “La meilleure chose pour médiatiser ce qu’on fait, c’est de prévenir la presse. Moi, j’écris à quelques journalistes. On peut les contacter sur Twitter et même Insta, c’est assez simple. Pour le blocus de mon lycée en 2017 contre le sexisme et le harcèlement, ça avait pris une ampleur médiatique folle parce qu’on l’avait dit à une journaliste avant et qu’elle avait fait passer le mot. C’est pas toujours le cas, parfois il ne se passe rien dans la presse, c’est super triste de voir les différences de visibilité entre les actions, notamment celles qui sont faites à Paris et celles de province.” Pour pallier ce problème, il est indispensable d’utiliser les réseaux sociaux. “Tu prends des photos, des vidéos, tu utilises les bons hashtags pour atteindre un maximum de gens, et surtout tu fais des lives. On a vu avec la #Libérationdu14 comment des comptes qui venaient à peine d’être créés ont été visités des dizaines de milliers de fois.” ⚡Préparer son discours Bien que la visibilité de votre action soit importante, ce qui l’est encore plus est la pertinence du message que vous voulez faire passer. Si des journalistes ont fait le déplacement jusqu’à vous, ce sera sûrement dans l’optique de vous poser des questions sur vos revendications. Soyez prêt.e.s à leur répondre ! “Il y en a qui improvise sur le moment, mais moi je prépare mes discours à l’avance, confie Shanley. C’est important de bien exprimer ce que tu as à dire et de bien mettre en lumière la problématique. Si on n’a pas envie d’apprendre par coeur son discours, je conseille au moins d’avoir des notes, pour être sûre de ne rien oublier.” ⚡Persévérer Quand votre journée d’action s’achève, non seulement vous êtes (très très) fatigué.e.s mais vous pouvez aussi vous sentir déçu.e.s, notamment parce que votre combat n’aura pas été relayé comme vous l’espériez. “Je comprends cette déception mais je crois vraiment aux petites actions. Si ce que tu as fait dans ton collège, ton village, a pu atteindre les personnes autour de toi, c’est déjà super bien ! Si ça n’a pas marché une fois, il ne faut surtout pas lâcher mais plutôt recommencer une deuxième fois, te montrer plus rusée, essayer une autre technique.” Je pense, avec Shanley, que la première fois est la plus difficile… après, vous êtes lancé.e.s ! Et pour conclure, elle tenait à rappeler ceci : “On n’est pas obligé de s’engager 40 heures par semaine, surtout quand on est ado. Si tu consacres deux heures par semaine à un truc, c’est cool. Rien que d’organiser un débat dans ton lycée, de créer un petit collectif… c’est utile. Il y a tellement de façons de faire bouger le monde, surtout dans les établissements scolaires. Il faut juste trouver la bonne idée et se rappeler tout le temps que chaque action, chaque mot comptent.” C’est à vous !Le défi de la semaine était archi difficile ou beaucoup trop facile pour vous ? N’hésitez pas à nous raconter ce que vous avez fait et à partager vos conseils avec les autres Petites Glo en nous écrivant à [email protected] ou en nous contactant directement sur les réseaux sociaux <3 Rendez-vous – Tout savoir sur les coulisses de la Masterclass des Petites Glo « Comment changer le monde quand on n’a ni pouvoir ni argent ? » ! Ce sera l’objet du club de mai des Glorieuses avec Sarah Durieux, directrice France de Change.org, Elvire Duvelle-Charles, journaliste, réalisatrice et activiste féministe, et Chloé Thibaud, journaliste et rédactrice en chef de la newsletter « Les Petites Glo ». Attention horaire exceptionnel spécial « pause déjeuner » de 13h à 14h en zoom. L’accès est à 15 € et gratuit pour les membres. 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