Parlons peu, parlons règles, par Rebecca Amsellem
Mercredi 6 mars 2019
Les règles sont politiques. La semaine dernière, « Period. End of Sentence. » de la réalisatrice Rayka Zehtabchi a gagné l’Oscar du meilleur documentaire. Il relate l’histoire des femmes indiennes qui se battent pour que les menstruations ne soient plus synonymes de honte (disponible sur Netflix). « Après avoir vu le film, déclare la jeune réalisatrice de 25 ans, j’espère que les gens comprendront que la stigmatisation de cette époque ne
concerne pas que les Indien·ne·s. Nous la vivons aux États-Unis et dans d’autres cultures ».
Et en France aussi.
Comme dirait Taous Merakchi aka Jack Parker, « Pourquoi insistons-nous à ce point pour renvoyer toute discussion liée aux règles au domaine de « l’intime », alors qu’on n’hésite pas à étaler d’autres aspects de notre intimité dans nos conversations ? Cessons donc d’avoir peur de cette fonction corporelle basique qui est tout de même à l’origine de nos existences à tous. Il est temps de traiter les règles – et surtout les personnes qui les ont
– avec le respect qu’elles méritent. » (Le grand mystère des règles. Pour en finir avec un tabou vieux, Paris, Flammarion, 2017).
Inspirée par la vague écossaise, Les Petites Glo (la première newsletter féministe et culturelle disponible par email et par WhatsApp qui s’adresse aux adolescentes désireuses de changer le monde) s’engage pour un accès libre et gratuit à des protections périodiques bio dans tous les collèges et lycées de France à partir de septembre prochain avec le mouvement #StopPrecaritéMenstruelle . Si l’Écosse y est parvenue, pourquoi pas nous ?
La Mairie du Xème (Paris) a déjà répondu à notre appel. Alexandra Cordebard, Maire du 10e, s’engage pour la
campagne des Petites Glo et lance la gratuité des protections hygiéniques bio dans les six collèges de l’arrondissement.
Pour reprendre les mots de la féministe américaine Gloria Steinem citée par Élise Thiébaut, « les règles deviendraient un événement masculin enviable et digne de fierté. Les hommes se vanteraient de la durée et du flot. Les garçons marqueraient l’arrivée de leurs règles, ce symbole tant attendu de virilité, avec des célébrations religieuses, et des fêtes strictement masculines. Le Congrès créerait un Institut national de dysménorrhée pour combattre les
douleurs menstruelles et le gouvernement fournirait les fonds pour des protections sanitaires gratuites. » (Ceci est mon sang, Paris, La Découverte, 2017).
Le mouvement #StopPrecaritéMenstruelle, c’est un sondage grâce auquel on apprend, entre autres, que près de 8 personnes qui ont leur règles sur 10 se sont déjà trouvées en pénurie de protection périodique mais alors que 67% des sondées ne sont pas
suffisamment à l’aise avec le personnel encadrant et éducatif pour demander de l’aide en cas d’oubli ou de pénurie de protection.
Le sondage Les Petites Glo ont réalisé un sondage sur un échantillon de 1653 sondé·es agé·e·s de 12 à 19 ans, entre le 19 et le 27 février. Les questions ont été diffusées à la communauté des Petites Glo et celle des Glorieuses via la newsletter et les réseaux sociaux.
Information 1 – Les règles coûtent cher. La précarité menstruelle est une réalité. 97% des sondé·es estiment que les protections périodiques sont trop chères.
Les règles, coûtent en moyenne, pour une personne ne présentant pas de ménorragie (dans quel cas, ce prix est plus élevé) : 24,6 euros par an. A raison d’un paquet de 20 tampons par mois coûtant 2,05 euros*, le tout multiplié par le nombre de cycles (12 mois) = 24,6 euros l’année.
*Sources : Enquête du magazine 60 millions de consommateurs, mars 2019.
Ce chiffre ne prend pas en compte les coûts nécessités par les anti-douleurs ainsi que les bouillottes nécessaires pour supporter la douleur ressentie au cours des menstruations. Les protections hygiéniques ne sont, aujourd’hui, pas remboursées par la sécurité sociale. Elles représentent un coût conséquent, plus particulièrement pour les personnes en situation de précarité.
Information 2 – Les règles sont sources de honte pour les personnes menstruées. Près de 8 personnes qui ont leur règles sur 10 se sont déjà trouvées en pénurie de protection périodique à l’école (87,8%). 49,5% ont été dans cette situation 2 ou 3 fois ; 26% plus de 5 fois et 12% plus de 10 fois.
Et pourtant, près de 7 personnes menstruées sur 10 ne sont pas suffisamment à l’aise avec le personnel encadrant et éducatif pour demander de l’aide en cas d’oubli ou de pénurie de protection (67,5%).
Information 3 – Leurs règles ne sont pas acceptées dans la société. Leurs règles ont déjà empêché 75,5% des sondé·es de faire sport ; 41% d’aller en cours et 53% d’entreprendre des activités sociales.
Les règles sont source de honte et de précarisation. Au cours de la campagne visant à rendre les protections périodiques accessibles gratuitement dans les lycées en Écosse, il a été démontré que de nombreuses (137 000) personnes ne se rendaient pas à l’école durant leurs menstruations.
Information 4 – Nous ne connaissons pas la contenance des protections hygiéniques. 82,5% des sondé·es ne connaissent pas la composition de leurs protections périodiques. On ne sait pas ce que contiennent la plupart des protections hygiéniques. Phtalates, dioxines, pesticides, … Nombreuses sont les substances indésirables encore détectées dans les produits périodiques – même bio – à ce jour. C’est pourquoi nous demandons la mise en place de distributeurs de protections bio, en toute transparence quant à la composition de ces derniers.
En conséquence, le mouvement #StopPrécaritéMenstruelle demande un accès libre et gratuit aux protections hygiéniques biologiques pour les élèves menstrué·e·s dans les collèges et lycées publics en France.
Combien cela coûte t-il ? 29M€ par an.
Les élèves sont scolarisé·es en moyenne huit mois par an. Le coût moyen s’élevant à 2,05 euros par mois et par personne, le coût total de cette opération est de 29M€ par an, soit 16,4€ par personne scolarisée dans un établissement public.
Le budget de l’Education Nationale consacré à l’enseignement scolaire étant de 51,1M (milliards), cette action – essentielle pour favoriser l’égalité entre les filles et les garçons – représenterait 0,0005% du budget annuel. Sources : Repères et références statistiques, Loi finance 2019 et Enquête du magazine 60 millions de consommateurs, mars 2019.
Quelles actions pour le mouvement #StopPrécaritéMenstruelle ?
👉 Signer la pétition en ligne à l’intention de Jean-Michel Blanquer, Ministre de l’Education Nationale « Mettre en place des distributeurs de protections périodiques bio dans les toilettes des collèges et lycées de France métropolitaine. »
👉 Partager votre expérience des règles à l’école sur les réseaux sociaux avec le hashtag #StopPrecariteMenstruelle sur les réseaux sociaux et appeler le gouvernement à rendre les protections gratuites.
👉 Participer à la conférence de lancement de la campagne des Petites Glo, #StopPrecariteMenstruelle, le 8 mars de 9h à 10h, chez Make My Lemonade, (61 quai de Valmy, 10ème, Metro République). Ce sera l’occasion d’échanger avec les ambassadrices du mouvement avec Jack Parker (Sang Tabou), Elise Thiébaut, Cyclique, Règles Elémentaires et une représentante de la Mairie du 10e. L’événement est déjà complet mais trois places sont à gagner pour Les Glorieuses ! Si ça vous intéresse, envoyez-nous un mail à [email protected]
1/ Sondage : en 2019, les règles sont encore une source de honte pour une majorité d’adolescentes.
2/ Dans la polémique sur le hijab de Decathlon, toutes les contradictions des anti-voile.
3/ Index d’égalité salariale : les grandes entreprises rivalisent de bonnes notes… Mais alors, tout va bien ?
4/ Harcèlement des féministes: Instagram va-t-il finir comme Twitter?
5/ Le congé paternité, un équilibre à trouver, un débat à poser.
6/ Podcast : Comment être un·e bon·ne allié·e ?
7/ Sexe : 9 chaînes Youtube qui brisent les tabous (en français).
8/ Le SOPK, la pathologie des règles dont on ne parle pas assez.
9/ 8 mars : pourquoi un collectif appelle à faire grève à 15h40 ?
10/ Les femmes parlent deux fois moins que les hommes à la télé et à la radio.
- Le club – En cette période de célébration des femmes, il est l’heure d’adhérer au Club des Glorieuses, de soutenir des
femmes qui s’engagent et de préparer la révolution féministe.
Notre prochain club aura lieu le 21 mars 2019, à 19h, en présence de Geneviève Fraisse, chez Make My Lemonade, 61 Quai de Valmy, 75010 Paris. Inscriptions ici (gratuit pour les membres du club).
- Prévenez vos petites sœurs : Les Petites Glo, la newsletter féministe et culturelle des adolescentes révolutionnaires, lancent La société secrète des Petites Glo, en partenariat avec Hachette Romans. Pour leur 1ère réunion, elles réaliseront des fanzines avec Lucile de Pesloüan, autrice de « Pourquoi les filles ont mal au ventre ». Le 13 mars de 15h à 18h chez OPOA, 30 Rue Albert Thomas 75010, Paris (Métro République). 2 places sont à remporter ! Contactez [email protected] en mentionnant vos noms et prénoms, votre âge, votre adresse mail, et votre numéro de
téléphone. Pour participer, il faut avoir entre 14 et 18 ans et avoir l’autorisation écrite d’un de ses parents. Si vous arrivez trop tard, stay tuned, des places seront à remporter sur nos réseaux sociaux très prochainement.
- Rencontres – Retrouvez Rebecca Amsellem :
– Mercredi 6 mars, de 19h à 20h, dans l’émission Le Téléphone Sonne, sur France Inter, pour parler de la démasculinisation des noms de professions.
– Vendredi 8 mars, de 9h à 10h à la conférence #StopPrecariteMenstruelle des Petites Glo, chez Make My Lemonade, 61 Quai de Valmy, 75010 Paris. Ouvert à tou·te·s les membres du Club sur inscription + 2 PLACES GRATUITES POUR TOUT·E ABONNE·E (email us).
– Vendredi 8 mars de 19h à minuit, rendez-vous au festival du collectif Ceryx, pour une table ronde intitulée « féministe, ce gros mot ». N’hésitez pas à vous inscrire ici.
– Samedi 9 mars de 15h45 à 16h45, à la table ronde « Où est l’argent pour les femmes ? » lors du grand forum féministe parisien qui se tiendra toute la journée sur la Parvis de l’Hôtel de Ville.
- Les Glorieuses soutiennent –
Festival « Trouble ton genre », Université de Grenoble, 11-14 mars 2019.
Né de la volonté de proposer à l’université une réflexion autour des questions du genre et des débats actuels suscités par le mouvement «#Metoo », le festival « Trouble ton genre », organisé par un groupe de chercheuses et d’étudiantes en Sciences humaines de l’Université de Grenoble, vise à sensibiliser les membres de la communauté universitaire et tout public extérieur aux questions du genre à travers des conférences, des ateliers thématiques (« Qu’est-ce le féminisme ? », « Les mots-clés du genre », « L’égalité dans les pratiques pédagogiques »), des performances, la projection du film de Delphine Dhilly, « Sexe sans
consentement »), la présentations d’ouvrages féministes, une table ronde sur la prostitution et une table d’information sur les règles. Programme détaillé sur le site.
- #8Mars15H40. Même travail, 1/4 de salaire en moins. Aujourd’hui, en France, le salaire des femmes est inférieur à 26% à celui des hommes. Le 8 mars à 15h40, c’est l’heure des comptes → JE REJOINS LE MOUVEMENT .
- Sortir les Femmes de l’ombre – À la suite d’une longue réflexion sur la représentation de la femme. L’artiste Lilyluciole souhaitait mettre en lumière des femmes trop souvent oubliées dans les médias, la publicité ou encore l’art. Ce projet s’engage et s’interroge sur la place des femmes artistes dans nos sociétés modernes et lutte également pour le droit et
l’égalité des sexes. C’est d’abord au sein du lieu mythique 59 Rivoli, le 8 mars que « Sortir les Femmes de l’Ombre » lancera sa seconde édition. Au programme, une table ronde et des performances artistiques produites exceptionnellement pour l’événement par une sélection d’artistes femmes aussi singulières que talentueuses. 59 rue de Rivoli, 75001 Paris – entrée gratuite.
- Théâtre : Les Guérillères – Pour célébrer le cinquantième anniversaire de la parution aux éditions de Minuit du livre de Monique Wittig « Les guérillères », et à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, la Compagnie AcThéArt présente une performance vocale et musicale d’extraits choisis de cette œuvre singulière,
à la fois utopie et épopée féministe, contemporaine de l’engagement de Monique Wittig dans le mouvement des femmes. Ce texte conserve aujourd’hui toute sa force et son actualité. Cet événement est présenté par la bibliothèque Marguerite Durand et la médiathèque Jean-Pierre Melville. Le 9 mars à 20h « Les Guérillères » de Monique Wittig à Paris dans le 13e. 2 places offertes pour les adhérent·e·s au club des Glorieuses.
Pour toute question : [email protected].
Crédits photo : Collage de Florence Fortuné, Claire Malot
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